Bulletin JSA – NOVEMBRE 2015

Bulletin rédigé par Nathalie LENFANT

RAVEL AVOCATS
4 rue de l’arcade
75008 PARIS


Éditorial

LA VIE AU TRAVAIL A L’HEURE DE LA TRANSFORMATION DIGITALE : VERS UN TRAVAILLEUR NUMÉRIQUE

La Révolution numérique, digitale même, n’est aujourd’hui plus en marche, elle est effective. Elle va vite, très vite, plus vite que l’adoption de la radio ou de la télévision, et suit inexorablement le rythme frénétique d’apparition de nouvelles « technos », de nouvelles « applis », d’objets connectés, véritablement utiles ou pas, là n’est pas la question.

Elle touche en premier lieu la sphère privée impactant nos quotidiens, transformant profondément nos modes de vie, nos rapports au temps et à l’espace et nos modes de communication. La vie au travail et tous ses acteurs (salariés, managers,dirigeants, élus et syndicats), atteints ou non d’une « geek mania », sont, en second lieu, également impactés.

Cette révolution digitale impose un changement de paradigme dans le monde du travail, créateur de nouvelles formes de collaboration, méthodes de travail, d’organisation, d’environnement de travail etc. L’entreprise est contrainte de se réinventer, sauf à se heurter à l’incompréhension des générations nouvelles Y et Z nées avec cette révolution.

Le droit du travail né en 1841 avec la loi sur le travail des enfants est un corpus de règles bâti pour une organisation taylorienne du travail, pour les manufactures, les usines et ateliers, et doit aujourd’hui être adapté.

D’une part, parce que la Révolution numérique impacte la qualité de vie au travail sous plusieurs angles :

– Les outils technologiques confrontent l’entreprise à une infobésité dont il va falloir gérer les flux. En effet, s’ils sont porteurs d’efficacité, ils sont aussi vecteurs d’une surcharge contreproductive, aboutissant à une perte de priorisation des tâches (qu’on songe au nombre d’emails reçus par jour), à une accélération du temps de réponse attendu. Certaines entreprises ont d’ailleurs commencé à réguler l’usage des emails (ex. suppression des pop-up d’arrivée des emails, connexion avec envoi d’email différé). Au niveau des branches, trois accords traitent de l’utilisation raisonnable des outils numériques.

– La référence à l’horaire de travail comme mesure de la charge de travail n’est plus adaptée dès lors que la numérisation remet en question la pertinence de ce lien.

– Les outils technologiques peuvent être facteurs de stress, burn-out, etc et peuvent donc impacter la santé des salariés. L’équilibre vie privée / vie professionnelle n’est pas toujours assuré. Certaines branches, dont celle des bureaux d’études (Syntec) ont créé un devoir de déconnexion pour permettre aux salariés de gérer la fluidité entre les deux sphères, personnelle et professionnelle (accord Syntec du 1er avril 2014).

La négociation sur la qualité de vie au travail, issue de l’Accord National Interprofessionnel du 19 juin 2013, devrait donc être un outil utile pour autant que les entreprises s’en emparent. Rappelons que la Loi Rebsamen du 17 août 2015 a ramené à trois les négociations obligatoires dans les entreprises, dont l’une concerne l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et la qualité de vie au travail.

D’autre part, parce que la Révolution numérique a des effets sur des éléments essentiels du contrat de travail (temps de travail, lieu de travail, lien de subordination):

– La notion juridique classique de lieu de travail n’est plus en phase avec les réalités terrain. Qu’on songe au nomadisme, aux sites de coworking, aux community buildings, aux différentes formes de télé travail (à domicile, en télé local, travail mobile ou nomade, télé management).

– Le travail connecté à distance notamment via les smartphones et le Cloud conduit à une appréhension de la durée du travail plus toujours en phase dans certains secteurs et métiers. Le forfait annuel en jours a été l’une des réponses qui devrait être sécurisée. La disparition progressive de la notion de « au temps et au lieu de travail » nécessite de définir une mesure de la charge de travail.

– Le lien de subordination, caractérisé par le pouvoir de donner des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner devient parfois une zone de tension dans les entreprises organisées en mode projet et encore plus dans les entreprises dites « libérées » qui s’affranchissent de la hiérarchie et du contrôle.

Face à cette Révolution numérique et fort de ces enjeux, le rapport Mettling commandé par François Rebsamen, relatif à la transformation numérique et vie au travail suggère 36 propositions pour réussir la transformation numérique en entreprise axées autour de six objectifs :

– Développer l’éducation numérique par la formation initiale et continue
– Placer la transformation numérique au cœur des dispositifs de professionnalisation et de passerelles entre les métiers
– Offrir un cadre juridique et fiscal incitatif et protecteur
– Mettre la transformation numérique au service de la qualité de vie au travail
– Parvenir à une entreprise de la co-construction et de la coinnovation
– Comprendre et anticiper les enjeux de la transformation numérique.

Il est urgent d’aboutir à une« synchronisation » entre la vie au travail qui s’adapte au quotidien à cette Révolution numérique et la conception de notre droit du travail. En attendant un débat législatif dont il n’est pas certain qu’il aboutisse, la tendance étant au régime amaigrissant de notre Code du travail, les entreprises peuvent et doivent s’emparer de ces sujets et utiliser la liberté, croissante depuis 2004, qui leur est donnée de négocier des accords d’entreprises. A elles de faire leur propre Révolution.

Actualité

POINT SUR LE NOMBRE DE STAGIAIRES EN ENTREPRISE

Le décret 2015-1539 du 26 octobre 2015, publié au JO, fixe des conditions supplémentaires d’application de la loi du 10 juillet 2014 relative à l’amélioration du statut des stagiaires.

Le nombre de stagiaires dont la convention de stage est en cours pendant une même semaine civile dans l’entreprise est limité à :

– Pour les entreprises dont l’effectif est supérieur ou égal à 20 salariés : 15% de l’effectif de l’entreprise
– Pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à 20 salariés : 3 stagiaires

Des dérogations sont cependant possibles pour les étudiants effectuant un stage obligatoire dans le cadre d’enseignements conduisant à un diplôme technologique ou professionnel. Dans ce cas, il appartient à l’autorité académique de définir par arrêté le nombre maximal de stagiaires approprié, dans la limite de :

– 20 % de l’effectif de l’entreprise si celui-ci est supérieur ou égal à 30 ;
– 5 stagiaires, si l’effectif est inférieur à 30.

Pour déterminer si le plafond du nombre de stagiaires est atteint, il convient de prendre en compte l’ensemble des personnes accueillies au titre des stages et des périodes de formation en milieu professionnel.

Le décret prévoit des modalités spécifiques de décompte de l’effectif. L’organisme d’accueil doit calculer :

– le nombre de personnes physiques qu’il employait au dernier jour du mois civil précédant le 1er jour du stage ;
– la moyenne sur les 12 mois précédents des personnes physiques employées.

Le résultat le plus élevé doit être retenu.

L’entreprise d’accueil a l’obligation de désigner, parmi son personnel, un tuteur chargé de l’accompagnement du stagiaire, étant précisé aujourd’hui qu’un même tuteur ne peut suivre simultanément que trois stagiaires au maximum. Ce plafond s’apprécie à la date à laquelle la désignation en tant que tuteur dans le cadre d’une convention de stage supplémentaire devrait prendre effet.

La mention sur le registre unique du personnel des stagiaires doit dorénavant être conservée pendant 5 ans.

L’inspecteur du travail est autorisé à demander communication de la convention de stage à l’établissement d’enseignement ou à l’entreprise pour contrôler le nombre maximal de stagiaires accueillis dans l’entreprise, le tutorat, les autorisations d’absence et de congés et le droit aux titres restaurant et à la prise en charge des frais de transport accordés aux stagiaires, ainsi que les dispositions relatives à leur temps de travail et de repos et à l’interdiction de leur confier des tâches dangereuses.

L’Administration peut sanctionner d’une amende le non-respect par l’entreprise des dispositions relatives au nombre maximal de stagiaires, à leur temps de travail et de repos et à l’interdiction de leur confier des tâches dangereuses; ainsi qu’à l’obligation de mise en place d’un tutorat par l’entreprise. Le décret précise que, pour déterminer le montant de l’amende, le Direccte doit tenir compte des circonstances de fait, notamment :

• du caractère réitéré du manquement;
• de la proportion de stagiaires par rapport à l’effectif ;
• de la situation économique et financière de l’entreprise ;
• de la commission d’autres infractions.

Jurisprudence

FORFAIT « RÉALISATION DE MISSIONS » DE L’ACCORD DE BRANCHE SYNTEC DU 22 JUIN 1999 RELATIF A LA DURÉE DU TRAVAIL

L’article 3 chapitre II de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail et annexé à la convention collective nationale Syntec instaure une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire pour les salariés relevant des modalités 2 « réalisations de missions ». Lesdites modalités s’appliquent aux salariés non concernés par les modalités « standard » ou les « réalisations de missions avec autonomie complète », et tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. Telles sont les conditions prévues pour relever de ce dispositif.

Le débat qui opposait une entreprise numérique à ses salariés portait notamment sur la condition d’une rémunération au moins égale au plafond de la sécurité sociale. Pour la société, il s’agissait d’une condition d’éligibilité temporaire du salarié nouvellement embauché applicable uniquement au jour de la signature de l’accord, soit au 22 juin 1999, et non une condition minimale de rémunération imposée pour permettre l’applicabilité de la modalité 2.

La Cour de cassation, confirmant la position de la Cour d’appel de Toulouse, ne suit pas ce raisonnement et rappelle « que seuls les ingénieurs et cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale relèvent des modalités 2 réalisations de mission ». Dès lors, pour relever d’une convention de forfait « Modalité 2 », encore faut-il que la condition de rémunération soit respectée.
Cass. soc.4-11-2015 n°14-25745 14-25746 14-25747 14-25748 14-2574914-25750 14-25751

COMMENT DÉCOMPTER LES SALARIES MIS A DISPOSITION D’UNE ENTREPRISE UTILISATRICE EN VUE DES ÉLECTIONS PROFESSIONNELLES ?

Des dispositions de l’article L.1111 du Code du travail, il résulte que seuls les salariés mis à disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l’entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an lors de la détermination des effectifs de l’entreprise doivent être pris en compte dans le calcul des effectifs en vue des élections professionnelles.

Qu’en est-il des salariés qui effectuent des missions ou interventions ponctuelles, ou dont la présence n’est pas permanente ?

La Cour de cassation précise que « sont intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail les travailleurs mis à disposition par une entreprise extérieure qui, abstraction faite du lien de subordination qui subsiste avec leur employeur, sont présents, fût-ce à temps partiel, dans les locaux de l’entreprise utilisatrice depuis au moins un an, partageant ainsi des conditions de travail en partie communes susceptibles de générer des intérêts communs » et conclut que n’avaient pas à être pris en compte dans les effectifs, les salariés des entreprises extérieures concernées qui ne se rendaient que de façon ponctuelle sur le site de cette société.
Cass. soc. 23-9-2015 n° 14-26.262

REÇU POUR SOLDE DE TOUT COMPTE SANS MENTION DU DÉLAI DE DÉNONCIATION EFFET LIBÉRATOIRE

Un salarié soutenait que le reçu qu’il avait signé n’avait pas d’effet libératoire, faute de mention du délai de 6 mois pour le dénoncer. La Cour de cassation indique que les dispositions de l’article L.1234-20 du Code du travail ne prévoient pas l’obligation pour l’employeur de mentionner sur le reçu pour solde de tout compte le délai de six mois pour le dénoncer. Elle en conclut que le reçu pour solde de tout compte, non dénoncé dans le délai de six mois, qui faisait mention des sommes versées en précisant la nature de celles-ci, à titre notamment de salaire, avait un effet libératoire.
Cass. soc. 4-11-2015 n° 14-10.657

ACCIDENT DU TRAVAIL – FACULTÉ DE CONTESTATION DU CARACTÈRE PROFESSIONNEL

La décision de reconnaissance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie est définitive pour l’employeur, passé le délai de 2 mois suivant sa notification. Il ne peut plus remettre en cause son caractère professionnel.

Certes mais peut-il toujours le faire dans le cadre d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable ?

La Cour de cassation vient de répondre pour la première fois par l’affirmative « l’opposabilité de cette décision ne privait pas l’employeur, dont la faute inexcusable était recherchée, de contester le caractère professionnel de l’accident ».
Cass. 2e civ. 5-11-2015 n° 13-28.373
Bulletin rédigé par Me Nathalie LENFANT, Ravel avocats
4, rue de l’arcade 75008 Paris

Bulletin JSA – OCTOBRE 2015

Bulletin rédigé par Maîtres Isabelle CHEVRE, Laurence SERAFFIN & Elise TRUCHELUT

SELARL Isabelle CHEVRE
19 Bis rue La Noüe Bras de Fer
44200 NANTES


Editorial

LES PROPOSITIONS DU RAPPORT COMBREXELLE

Alors que les lois MACRON et REBSAMEN étaient en préparation,le Premier Ministre chargeait Monsieur Jean-Denis COMBREXELLE, Président de la section sociale au Conseil d’État et ancien Directeur général du travail, d’une mission sur « l’élargissement de la place de l’accord collectif dans notre droit du travail et la construction de normes sociales ».

Ce rapport publié le 9 septembre 2015 entend ainsi faire « une plus grande place à la négociation collective et en particulier à la négociation d’entreprise, pour une meilleure adaptabilité des normes aux besoins des entreprises ainsi qu’aux aspirations des salariés ».

Un projet de loi sur « la négociation collective, la place de la loi, le rôle et la structuration des branches » doit être présenté en Conseil des Ministres fin 2015.

LE RAPPORT COMBREXELLE ET LE CODE DU TRAVAIL

En donnant une place différente aux accords d’entreprise, le Code du travail peut-il alors faire de la loi un appendice au secours des petites et moyennes entreprises, souvent dépourvues de partenaires sociaux ?

Tel n’est pas l’objectif ; il ne s’agit plus de modifier tel ou tel article du Code du travail, il s’agit d’apprendre à régler les rapports sociaux différemment, non plus sur une logique purement juridique, formelle et institutionnelle, mais faire de la négociation collective un outil au service de l’emploi et de la compétitivité des entreprises.

Malgré les différentes évolutions législatives en faveur de la négociation collective, l’efficacité s’avère relative du fait des contraintes imposées par le Code du travail. Pour les employeurs, toute négociation implique des contraintes et des coûts, pour les acteurs syndicaux, souvent un échec dans un contexte de crise et de manques de moyens des entreprises.

Le rapport COMBREXELLE fait à ce titre état de pratiques actuelles de négociation mal adaptées aux PME-TPE.

Le rapport prônait ainsi la mise en place de deux grandes réformes :

– Sur le moyen terme, une réforme d’ensemble du Code du travail.

– Sur le court terme, c’est l’objet du rapport COMBREXELLE.

LE RAPPORT COMBREXELLE ET LE COURT TERME SOIT 2016

La nouvelle architecture du Code du travail, laquelle pourrait entraîner une réforme constitutionnelle, ne peut se faire en un jour !

Aussi une première réforme est déclarée prioritaire pour la vie des entreprises et des salariés portant sur quatre champs : le temps de travail, les salaires, les conditions de travail et l’emploi, et selon les modalités suivantes :

– Après concertation avec les partenaires sociaux, clarifier et élargir le champ de la négociation sociale dans les domaines des conditions de travail, du temps de travail, de l’emploi et des salaires en donnant la priorité à l’accord d’entreprise.

– Sous la réserve de la redéfinition des ordres publics législatifs et conventionnels de branche, dans ces quatre domaines, l’accord d’entreprise devra s’appliquer en priorité. A défaut d’accord de branche ou d’accord collectif, l’application du Code du travail se fera à titre supplétif.

– Définir les missions des Branches, c’est-à-dire définir ce qui relève de l’ordre public conventionnel et accompagner par des propositions d’accords-types les TPE, accompagner aussi les PME dans la négociation.

– Prévoir un mécanisme des fusions de Branches pour celles qui représentent moins de 5000 salariés, par la mise en place de conventions collectives d’accueil pour faire place aux TPE et aux PME lorsqu’elles sont dépourvues de partenaires sociaux, et privées ainsi d’accords d’entreprise. L’objectif serait de rationaliser le nombre de branches professionnelles actuellement proches de 700 à 100.

– Faire prévaloir aussi l’application directe de l’accord collectif préservant l’emploi sur les contrats de travail.

Priorité doit donc être faite à l’accord d’entreprise, le Code du travail et le contrat de travail ne devenant que des sources supplétives dans les domaines concernés.

LE RAPPORT COMBREXELLE, C’EST AVANT TOUT CRÉER UNE DYNAMIQUE DE LA NÉGOCIATION

Le rapport insiste sur un enjeu de dynamisation des comportements, l’articulation des différentes sources de normes étant présentée comme secondaire.

Tout juste imprégnées de réformes en droit du travail via les lois MACRON et REBSAMEN, les entreprises ont aussi à prendre en considération d’autres données non plus juridiques mais économiques et concurrentielles. Le rapport COMBREXELLE est maintenant là pour affirmer cette volonté; la nouvelle architecture du Code du travail sera le fruit de constructions nouvelles basées non plus sur une logique juridique et formelle, mais sur une nouvelle répartition entre ce qui doit relever de la négociation collective pour en faire un outil de régulation économique et sociale et ce qui doit relever de l’ordre public.

Un aveu à travers ce rapport :
le Code du travail dans sa rédaction actuelle, se caractérise par une grande complexité de la loi où il est bien difficile de déterminer, sur un sujet donné, la marge de manœuvre qui est laissée aux négociateurs d’un accord de branche ou d’entreprise.

LE RAPPORT COMBREXELLE, UNE INTERROGATION QUANT À SON EFFICACITÉ

La proposition n° 43 du rapport invite à généraliser le principe d’accord majoritaire, c’est-à-dire de l’accord signé par des organisations syndicales ayant recueilli la majorité des suffrages aux dernières élections. Même si une avancée sera significative par l’adhésion des petites entreprises à des accords de branche, concernant les accords d’entreprise, ceux-ci ne pourront voir le jour qu’au bon vouloir des organisations syndicales majoritaires.

Actualité

LOI MACRON : REFORME DE LA JUSTICE PRUD’HOMALE

Le constat était unanime quant aux dysfonctionnements importants des Conseils de prud’hommes.

La loi du 6 août 2015 vise à améliorer l’efficacité et la rapidité de la justice prud’homale et à donner un nouveau statut « professionnalisant » aux Conseillers prud’hommes.

Le bureau de conciliation voit ses pouvoirs renforcés pour les instances introduites à compter du 7 août 2015.

Il devient le bureau de conciliation et d’orientation (BCO).

En cas d’échec de la conciliation, le BCO peut désormais, dans le cadre de sa mission d’orientation, renvoyer les parties :

• Devant le bureau de jugement dans sa formation restreinte, c’est-à-dire composée d’un Conseiller employeur et d’un Conseiller salarié, si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et avec l’accord des parties. Elle devra statuer dans les 3 mois (délai qui devrait être difficilement tenable en pratique).

• Devant le bureau de jugement dans sa formation de départage, si les parties le demandent ou si la nature du litige le justifie. La loi prévoit donc la possibilité d’aller directement de la phase de conciliation à la formation de jugement présidée par un juge professionnel. Il est à noter que les juges départiteurs sont désormais des magistrats du Tribunal de Grande Instance (et non plus du Tribunal d’Instance).

• Et à défaut, devant le bureau de jugement dans sa composition classique.

La loi redéfinit le statut des Conseillers prud’homaux vers une meilleure professionnalisation

La loi Macron leur impose désormais une formation initiale de 5 jours en début de mandat, et une formation continue maintenue à 6 semaines par mandat. Le Conseiller qui n’aurait pas satisfait à l’obligation de formation initiale dans un délai fixé par décret sera réputé démissionnaire. Ces dispositions entrent en vigueur à compter du premier renouvellement des Conseillers prud’hommes (soit au plus tard au 31 décembre 2017).

La loi du 6 août 2015 modifie également la déontologie applicable aux Conseillers prud’hommes et crée une véritable procédure disciplinaire en cas de manquements.

Reste à savoir si cette réforme répondra véritablement aux objectifs qu’elle s’est fixée…

Jurisprudence

UNE DEMANDE DE RUPTURE CONVENTIONNELLE ÉMANANT DE LA SALARIÉE POSTÉRIEUREMENT À UNE DÉMISSION N’EFFACE PAS CETTE DERNIÈRE

Une salariée après avoir démissionné, souhaitait revenir sur sa décision et a sollicité un entretien en vue d’une rupture conventionnelle.

C’est ainsi que la salariée espérait que dans la mesure où son employeur avait accepté par courrier le principe d’une rupture conventionnelle en la convoquant, il avait de ce fait accepté la rétractation de sa démission et que, par conséquent, son contrat était toujours en cours.

Sûre de son fait, la salariée ne s’était même pas présentée à l’entretien.

Pour la Cour, la seule convocation d’une salariée, ayant déjà démissionné, à un entretien en vue de conclure une rupture conventionnelle ne vaut pas renonciation commune des parties à cette démission.

Si depuis les Arrêts du 3 mars 2015 (Cass. soc. 3 mars 2015 n°13-20.549, n°13-15.551 et n°13-23.348), «lorsque le contrat a été rompu par l’exercice par l’une ou l’autre des parties de son droit de résiliation unilatérale, la signature postérieure d’une rupture conventionnelle vaut renonciation commune à la rupture précédemment intervenue», ce n’est qu’à la condition que le processus de rupture conventionnelle soit mené à son terme. Cass. soc. 16 septembre 2015, n°14-10.291

RUPTURE CONVENTIONNELLE ET VICES DU CONSENTEMENT : LA COUR DE CASSATION PRÉCISE SA LIGNE JURISPRUDENTIELLE

Depuis l’introduction par la loi du 25 juin 2008 de la rupture conventionnelle du contrat de travail, la Cour de cassation ne cesse d’en préciser les contours. Il en ressort que rares sont les décisions annulant les ruptures conventionnelles, ce qui fait le succès et la sécurisation de ce mode de rupture pour les employeurs.

Toutefois, et il s’agit là du garde-fou de la rupture conventionnelle, cette dernière est soumise à l’absence de vice du consentement du salarié.

La Cour de cassation ayant relevé que c’est suite à un avertissement dont les explications tendaient à inviter le salarié à «exécuter loyalement son contrat ou [à] prendre l’initiative d’une rupture », que celui-ci a, en conséquence, été incité à conclure une rupture conventionnelle.

Il ressort, en outre, de cette décision que la Cour de cassation a relevé aussi que des promesses avaient été faites au salarié concernant le versement de la contrepartie pécuniaire de sa clause de non concurrence ; que l’employeur n’a pas tenu ses promesses en levant le salarié de sa clause. La Cour a conclu que le salarié avait été victime d’un vice du consentement.

Pour ces motifs, malgré l’homologation, cette rupture conventionnelle a fait l’objet d’une annulation par le juge. Cass. soc. 9 juin 2015, n° 14-10.192

La Haute Juridiction confirme sa position dans un Arrêt du 16 septembre 2015, où elle a annulé la rupture conventionnelle imposée par l’employeur cette fois-ci en alternative à un licenciement.

Dans un climat tendu entre les parties, ce qui n’est pas de nature à affecter à lui seul la validité d’une rupture conventionnelle (Cass. soc. 23 mai 2013, n°12-13.865), un salarié ayant reçu plusieurs courriers le mettant soit en demeure de reprendre son poste, soit refusant de lui accorder ses congés en l’absence de demande précise, a été convoqué à un entretien pour finaliser une rupture conventionnelle qu’il a refusée.

Le salarié a reçu une mise à pied à titre conservatoire et une convocation à entretien préalable en vue d’un licenciement pour faute grave, et ce même jour, a signé une rupture conventionnelle.

Les juges du fond ont considéré que le salarié n’avait eu d’autre alternative que de signer la rupture conventionnelle. Dans ce contexte de pressions exercées par l’employeur, le consentement du salarié a été vicié. Cass. soc. 16 septembre 2015, n°14-13.830
Bulletin rédigé par Maîtres Isabelle CHEVRE, Laurence SERAFFIN & Elise TRUCHELUT
SELARL Isabelle CHEVRE – 19 Bis rue La Noüe Bras de Fer 44200 NANTES

Bulletin JSA – SEPTEMBRE 2015

Bulletin rédigé par Philippe RAINEX

SELARL ACDP
11 Boulevard Voltaire
19100 BRIVE


Actualité

DE L’ILLISIBILITÉ DU CODE DU TRAVAIL ET DE L’ILLISIBILITÉ DE LA JURISPRUDENCE

LE CODE DU TRAVAIL EST DEVENU ILLISIBLE

Très certainement en raison d’une accumulation de textes mal rédigés mais aussi et surtout à cause d’une lecture judiciaire et administrative du texte de plus en plus éloignée de la réalité du terrain, bien souvent divergente, variable selon le temps et le lieu, voire contradictoire avec d’autres textes du même Code.

C’est ainsi qu’un inspecteur du travail, se référant aux articles L 4121-1 et L 4121-2 du Code du travail, et estimant qu’en présence d’une lettre reprochant (sans le sanctionner) à un salarié le caractère pernicieux de son comportement, son harcèlement désorganisateur et son machiavélisme, considère qu’il s’agit de termes extrêmement durs qui ont pu contribuer à la dégradation de son état de santé (le salarié a été arrêté par son médecin traitant à réception de la lettre). Il invite en conséquence l’employeur à revoir les modalités d’exercice du pouvoir disciplinaire vis-à-vis du personnel en application des principes généraux de prévention énoncés aux articles précités.

Selon le premier de ces articles l’employeur, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé mentale des travailleurs.

Des accords de branche ou d’entreprise sur les risques psychosociaux ont été signés qui prennent en considération des situations liées pour l’essentiel aux conditions de travail particulières propres aux activités concernées selon qu’il s’agit de commerce, d’industrie ou des services.

Sont ainsi pris en compte, selon le cas, les conduites agressives de certains publics, l’éloignement géographique des managers, le manque de moyens disponibles pour réaliser le travail, la charge mentale, toutes formes particulières de risques propres à une branche professionnelle ou à une entreprise particulière.

En l’occurrence, l’inspecteur du travail demande à l’entreprise de prendre des mesures pour assurer la sécurité et protéger la santé mentale de ses salariés lorsqu’il fait application du droit disciplinaire prévu par les articles L.1331-1 et suivants du Code du travail.

Ce faisant, l’inspecteur du travail considère que l’application du Code du travail constitue un risque à elle seule.

L’inspecteur confirme lui-même l’illisibilité de ce Code puisque, si on l’en croit, les nouveaux articles L 4121-1 et suivants (lois du 11 novembre 2012, 6 août 2012, 4 août 2014 notamment) ne permettent plus l’application du droit disciplinaire tel que codifié au même Code du travail depuis longtemps déjà.

Cette invraisemblable lecture du Code du travail, si elle devait être validée, aurait des conséquences incalculables.

La motivation d’une lettre de licenciement pour faute grave ou faute lourde deviendrait impossible. Énoncer la vérité comme l’a fait l’employeur en question n’étant plus possible, toute circonvolution de vocabulaire pour décrire la réalité sans la qualifier telle qu’elle est réellement afin de ne pas porter atteinte à la santé du salarié pourra entraîner la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse voire abusif parce que sa motivation est trop édulcorée.

Est-il possible de continuer à utiliser les motifs de vol, détournement de fonds, agissements frauduleux, état d’ivresse, ébriété, intempérance invétérée, insultes, agressivité, violence, menaces. Sera-t-il possible par exemple de reprocher à un salarié d’avoir menacé de mort son supérieur hiérarchique ?

Le reproche fait à un salarié de harcèlement à l’égard d’un collègue devient tout aussi impossible alors que le harcèlement est spécifiquement prévu par le Code du travail et que l’employeur doit le combattre sous peine de sanctions civiles et pénales.

Plus généralement, la description du comportement déviant (ce terme est-il encore possible ? rien n’est moins sûr) du salarié deviendrait interdite et le droit disciplinaire inapplicable.

Il faut espérer que les juridictions judiciaires et administratives auront très rapidement une autre analyse.

L’analyse complète et objective des articles L 4121-1 à L 4121-5 du Code du travail permet en effet de considérer que ne sont visées que les situations de travail et d’organisation du travail, en aucun cas les procédures disciplinaires faisant l’objet d’autres dispositions législatives et règlementaires.

De même, l’article L 1331-1 du Code du travail énonce clairement le pouvoir disciplinaire de l’employeur à partir de sa propre appréciation du caractère fautif d’un licenciement.

La sanction disciplinaire par nature est une mesure qui génère inévitablement une réaction du salarié. C’est d’ailleurs sa vocation. L’encadrer dans sa formulation ne peut que dénaturer la réalité et le juge judiciaire a tout pouvoir pour analyser les faits et leur correspondance à la qualification qui en a été faite par l’employeur.

Si l’inspecteur du travail peut être amené à intervenir en matière disciplinaire pour un représentant du personnel, c’est uniquement lorsque la sanction envisagée est un licenciement ou lorsque la sanction prise, quelle qu’elle soit, est discriminatoire par exemple.

Toujours est-il que si l’inspecteur du travail persiste dans sa décision, l’employeur sera contraint de faire valoir sa position par des procédures administratives et judiciaires longues, tout aussi incertaines, tout en perdant pendant ce temps de son autorité, de sa confiance en lui, la représentation du personnel n’hésitant pas à envenimer les relations sociales sur la base d’une telle analyse qui, elle, par contre, pose le problème de la sécurité et de la santé mentale du chef d’entreprise.

LA JURISPRUDENCE EST DEVENUE ILLISIBLE

La jurisprudence de la Cour de cassation aboutit également à des aberrations. C’est ainsi que dans un arrêt du 3 juin 2015 (n° 14-11.324), la Chambre sociale considère que l’employeur est responsable de l’exposition d’un salarié au tabagisme passif même si ce dernier s’y est exposé volontairement en accompagnant les fumeurs dans le local dédié à la pause cigarette et ne s’est jamais plaint de ses conditions de travail.

Cet arrêt est certes dans la droite ligne de l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur en matière de santé des travailleurs, mais toute ligne de raisonnement doit avoir ses limites sous peine de devenir une doctrine radicale, au résultat contraire à son principe de départ, aussi justifié soit-il.

Dans l’exemple cité, doit-on interdire aux non-fumeurs d’entrer dans le local destiné à la pause cigarette, auquel cas se pose la possibilité d’une interdiction empêchant deux salariés, l’un fumeur, l’autre non-fumeur, de se reposer ensemble pendant un temps de pause ce qui constitue une atteinte à la liberté individuelle ? L’employeur doit-il seulement afficher le danger à l’entrée du local ce qui ne le fera pas échapper à une condamnation, auquel cas il conviendra de fermer définitivement le local ?
L’affectation d’un préau extérieur (isolé des ouvrants des locaux de travail) à l’usage des fumeurs suffit-elle à éliminer tous les risques alors que l’on est dans l’enceinte de l’entreprise ?

Parce que l’État ne peut se passer des impôts générés par la vente des cigarettes et parce qu’il est impossible à l’employeur de porter atteinte à la liberté individuelle, ce dernier est condamné par avance.

Le juge chargé d’annuler les clauses léonines ne serait-il pas sur la pente des décisions léonines ?

Le temps de pause est par nature un temps pendant lequel le salarié peut vaquer à ses occupations personnelles, où il n’est plus sous l’autorité hiérarchique, et voilà que l’employeur doit surveiller ses fréquentations pendant ce temps de travail non effectif jusque dans le local fermé et destiné aux fumeurs.

En matière de santé au travail, la Justice peut aussi se montrer totalement divergente au travers de ses institutions selon qu’elles relèvent de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif.

C’est ainsi qu’en matière d’introduction d’alcool dans les entreprises par les salariés la plupart des règlements intérieurs ont instauré son interdiction admise par la Cour de cassation depuis longtemps déjà. (Cass.soc. 3 octobre 1969, n° 68-40.480)

La Cour de cassation estimait en effet que l’article R.4228-20 du Code du travail ancien selon lequel aucune autre boisson que le vin, la bière, le cidre et le poiré n’était autorisée sur le lieu de travail n’empêchait pas l’employeur d’interdire toute consommation d’alcool s’il l’estimait opportun.

Mais le Conseil d’État, le 12 novembre 2012 (n° 349365), se basant sur l’article L.232-2 du Code du travail (devenu L. 1321-3) selon lequel le règlement intérieur ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché, a contredit la Cour de cassation.

En l’occurrence l’employeur avait fait valoir qu’il lui était difficile de contrôler une consommation limitée d’alcool. Il n’a pas été entendu.

Suite à cette divergence de jurisprudence mettant en évidence une fois de plus la difficulté d’appliquer le Code du travail, un décret du 1er juillet 2014 a complété l’article R.4228-20 du Code du travail.

Désormais, lorsque la consommation de vin, de bière, de cidre et de poiré est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur doit prévoir dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service, les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d’accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d’une limitation, voire d’une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché.

En résumé, l’interdiction générale de consommer de l’alcool dans l’entreprise n’est possible que dans de très rares cas. La consommation de ces alcools est de droit dans tous les autres cas, mais elle doit faire l’objet de mesures préventives et l’accident est interdit à l’employeur alors même que le contrôle a priori est impossible puisque par définition les consommations addictives se font en cachette.

Drôle d’analyse que celle qui, sous prétexte de l’obligation de respect des libertés individuelles, oblige l’employeur à épier ses salariés dans le local de pause cigarette ou dans le restaurant d’entreprise et à le contrôler dans ses moindres faits et gestes.

« Flexible droit » énonçait le Professeur CARBONNIER prônant une sociologie du droit sans rigueur et regrettant en 1969 déjà le fétichisme juridique lié à l’excès de droit, « cercle vicieux produit ou du moins entretenu par les juristes eux-mêmes. »

Depuis que l’obligation de sécurité de résultat est devenue un dogme, toute situation de risque est considérée comme relevant de la responsabilité du chef d’entreprise. Si cela peut parfaitement se concevoir dans le cadre de son pouvoir de décision et d’organisation du travail, l’extension de cette responsabilité à des comportements individuels tels que ceux liés aux addictions relève précisément du double fétichisme juridique.

La jurisprudence met en avant en l’espèce deux principes fondamentaux du Code du travail, le respect des libertés individuelles et l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur mais, au lieu de fixer les limites de leur coexistence par nature délicate, elle en fait une application radicale, irrationnelle, illisible.

Qu’un employeur soit a priori responsable du comportement personnel déviant de son salarié n’est compris par personne, sauf par le salarié concerné une fois le risque réalisé. L’employeur sanctionné à la place du fumeur parce qu’il doit le laisser fumer, l’employeur sanctionné à la place de l’intempérant parce qu’il doit le laisser boire, cela est incompréhensible pour toute personne de bon sens.

Le fétichisme juridique conduit à oublier la simple réalité, le bon sens, l’équité. Ce sont pourtant de telles valeurs qui devraient prévaloir sur le droit pour faire émerger les vraies responsabilités dans une collectivité ou le lien de subordination ne peut tout justifier.

LA LOI MACRON EST PARUE LE 6 AOÛT 2015

Qui n’a pas entendu parler de cette loi et de celui dont elle porte le nom. Rarement une loi n’aura aussi bien porté son nom. Macron a pour origine grecque « makros » signifiant « long ». C’est le cas du texte de loi, véritable fourre-tout de 308 articles qui touchent à de très nombreux domaines aussi variés que l’ouverture des commerces le dimanche, la profession des notaires, le droit du travail…

Cette « loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », demande du fait de sa densité des développements spécifiques importants pour chaque thème traité.

Nous noterons simplement, dans un premier temps, quelques éléments importants :

– Assouplissement du travail du dimanche et de nuit,

– Réforme des Conseils de Prud’hommes avec création notamment d’un véritable statut de défenseur syndical,

– Possibilité de prêts de trésorerie limités à deux ans entre entreprises.

LA LOI REBSAMEN EST PARUE LE 18 AOÛT 2015

Cette loi relative au dialogue social et à l’emploi comporte notamment les dispositions suivantes :

– Regroupement à compter du 1er janvier 2016 des 17 obligations annuelles d’information du comité d’entreprise en trois consultations,

– Regroupement simultané, en trois thèmes, des négociations obligatoires d’entreprise,

– Possibilité de deux renouvellements des CDD,

– Suppression de la fiche individuelle de prévention des expositions pour la pénibilité,

– Dispense de recherche de reclassement en cas d’inaptitude médicale d’origine professionnelle à tout poste,

– Amélioration de la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle.

Jurisprudence

TEMPS DE DÉPLACEMENT DOMICILE-CLIENTS

La Cour de Justice de l’Union Européenne précise dans un arrêt du 10 septembre 2015 (aff.C-266/14) que les déplacements des salariés sans lieu de travail fixe ou habituel entre leur domicile et les sites du premier et du dernier client de la journée constituent du temps de travail.

Le droit français n’est pas conforme à cette décision. Le Code du travail stipule que le temps de déplacement professionnel entre le domicile et le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif, seule une contrepartie financière ou temporelle devant être prévue en cas de déplacement sur un lieu de travail distinct du lieu de travail habituel obligeant à un temps de déplacement plus long.

En l’occurrence il s’agit de techniciens assurant la maintenance et l’installation de dispositifs de sécurité chez des particuliers ou dans des entreprises qui ne sont rattachés à aucun établissement autre que le siège dont ils sont très éloignés. Ils reçoivent les adresses d’intervention la veille pour le lendemain et changent tous les jours de clients.

Se pose donc dès à présent la question de la notion de lieu de travail habituel. Dans le cas qui a fait l’objet de la jurisprudence, il est évident qu’il n’y a pas de lieu habituel. Mais qu’en est-il par exemple pour une aide à domicile qui travaille habituellement chez plusieurs clients selon un ordre différent chaque jour ?

Même s’il est possible que la France ne modifie pas tout de suite sa législation, car elle n’y est pas obligée, une harmonisation apparaît inévitable pour ne pas rendre le Code du travail encore plus illisible.

ATTESTATION PÔLE EMPLOI

La Cour de cassation se montre de plus en plus sévère à propos de la remise de ce document. On sait déjà qu’elle exige une remise immédiate de celui-ci lors de la fin du contrat de travail et que tout délai de remise à un salarié se traduit par l’allocation de dommages intérêts à ce dernier.

La Cour persévère en ce sens dans un arrêt du 24 juin 2015 (Cass. soc. N° 14-13.829) en cas d’erreur sur le motif exact de la rupture du contrat de travail.

En l’occurrence, l’employeur avait mentionné « démission » au lieu de « prise d’acte ».

La Chambre sociale considère qu’il y a nécessairement, du seul fait de l’erreur de motif, un préjudice, peu important que le salarié n’ait pas besoin d’allocations de chômage (il a retrouvé un emploi par exemple) ou n’ait pas droit à ces prestations (il s’est expatrié aussitôt son contrat rompu par exemple)…

Attention donc à la rédaction de ce document le plus souvent établi dans la précipitation.

L’employeur, lui, n’a pas le droit d’être illisible.

Bulletin rédigé par Philippe RAINEIX, avocat spécialiste du droit du travail, du droit de la sécurité sociale et de la protection sociale,
SELARL ACDP, 11 boulevard Voltaire, 19100 BRIVE

Bulletin JSA – JUILLET – AOUT 2015

Bulletin rédigé par Maître Philippe BOUDIAS

SCP PHILIPPE & LOUIS BOUDIAS
3 Villa Victor Hugo
75116 PARIS


Editorial

LA REFORME A TOUT CRIN

« Ainsi, descendant de l’Olympe où siègent et pérorent les présentateurs-chroniqueurs-éditorialistes, flanqués d’une cohorte d’experts attitrés, une même rhétorique soutient les discours politiques dominants : l’invocation de l’urgence des « réformes » et de la « nécessité » du « dialogue ».
Henri Mater et Mathias Raymond — Médias et mobilisations sociales —page 14-2007

Qui ne le sent pas ? Le vent de la réforme infuse le droit du travail. Il mobilise le gouvernement, le législateur, la classe politique, tes commentateurs de toute sorte suggérant des analyses tout aussi profuses que péremptoires et ne cesse de faire couler beaucoup d’encre, trop sans doute et trop vite.

Bien évidemment, nul ne peut nier l’impérieuse nécessité de penser puis de procéder à des réformes tant les textes s’empilent, génèrent une forme d’intrication. Pour autant, l’emballement actuel, empreint de fébrilité, laisse redouter le pire si l’on veut appréhender et admettre, un tant soit peu, une certaine forme de complexité dont les quelques aspects suivants rendent compte :

(1) L’ambition de réformer le droit du travail ne saurait d’évidence, à elle seule, redynamiser un marché du travail atone qui ne cesse de se dégrader. Le débat social ne peut étouffer ni même servir à évincer les questions économiques fondamentales dont seule la résolution nous permettrait d’espérer retrouver un rayonnement et dont la prégnance est pourtant esquivée par nos politiques depuis maintenant plusieurs décennies.

Or tel est, semble-t-il, pourtant le cas. L’impuissance du politique dans le domaine de la redynamisation économique explique, d’évidence, son tropisme à agiter des réformes dans des domaines où il a encore prise.

(2) Le bilan des réformes déployées depuis plusieurs années au gré des majorités conduit à un constat cinglant permettant de qualifier ces réformes de labyrinthiques la complexité succédant à ta complexité. Le court-termisrne a, définitivement, vécu et produit des effets désastreux.

Une réforme se pense, se prépare par la désignation de ses objectifs, sa méthode et davantage encore la mesure de sa faisabilité.

(3) Le droit du travail est chargé d’histoire dont on ne peut s’acquitter d’un trait de plume. Il est, en outre, habité par une multiplicité de sources qu’elles soient légales, conventionnelles, contractuelles ou usuelles avec le principe d’application de la norme la plus favorable. La jurisprudence, également, imprime cette matière de son poids qu’il soit quasi normatif ou interprétatif. Comment réguler, refondre ou réordonnancer cette diversité des sources ? Cette question prédétermine l’axe des réformes.

(4) De la volonté de simplification au simplisme démagogique, il n’y a qu’un pas, Nous l’avons, semble t-il déjà franchi. Est-il sérieusement raisonnable et rai-sonné de prétendre faire muer un code du travail pléthorique en un code qui ne regrouperait que 50 principes fondamentaux et se résumerait à une simple « constitution » du travail (A Lyon Caen — R. Badinter le travail et la loi — ed. Fayard) ? Peut-on, de même, à l’instar de certains politiques, désigner le Code du travail actuel comme souffrant d’obésité pour préconiser une cure amaigrissante avec un objectif de limitation du Code à 150 pages sans plonger dans l’incommensurable absurdité ?

Ces messages, ces mots d’ordre relayés par des débats abscons où la prétention sert de paravent à l’incompétence ne peuvent constituer l’antichambre d’une reforme pensée. Tous ces éléments de langage réducteurs laissent, néanmoins, leur trace au détriment d’échanges argumentés et avisés (cf. P. Lokies professeur des universités : simplification du droit la grande mascarade — Semaine Sociale Lamy n° 1677 p 4).

(5) Les réformes voulues s’entendent t-elles de réformes parcellaires du droit du travail ou d’une refonte globale ? Si le législateur n’avait, jusqu’alors, envisagé, pragmatiquement, que des réformes pan par pan, il semble aujourd’hui ambitionner une refonte globale, Un tel objectif semble pourtant hors de portée et au demeurant la matière du droit du travail qui distingue par exemple relations individuelles et collectives semble dicter un principe de réforme sectoriel.

(6) Fort curieusement, le champ d’analyse de la réforme semble étrier certains acteurs et en préserver d’autres.

Comment s’expliquer l’urgence a réformer les conseils de Prud’hommes et le total mutisme vis-à-vis du fonctionnement des Cours d’appel au seul motif, inavoué, qu’elles sont régies par des magistrats rétifs à toute réforme et parfois dénués de toute auto-critique ?

De même, ne pourrait-on, à tout le moins, s’interroger sur le poids extrême de la jurisprudence normative de la chambre sociale de la Cour de cassation dont il résulte une insécurité juridique majeure du fait de sa rétroactivité ? Tel n’est pourtant pas le cas, silence le plus absolu.

(7) De nouveaux mythes, par ailleurs, aveuglent et parasitent le débat, Privilégier comme norme l’accord de branche ou d’entreprise semble apparaitre le nouveau paradigme. Il a, bien sûr, pour légitimité de rendre le pou-voir aux acteurs sociaux. Pour autant, ce principe peut-il être généralisé à l’ensemble du droit du travail sans risque de créer une hétérogénéité flagrante des statuts salariés selon les branches ou les entreprises ?

(8) La réforme envisagée ne peut, au surplus, prendre le risque d’être une fracture sociale et un point de clivage entre les entre-prises et les salariés sans quoi elle serait, inéluctablement, vouée à l’échec.

Le signal de la réforme est lancé :

– Jean Denis COMBEREXELLE a été investi d’une mission en vue de formuler des propositions pour élargir la place de l’accord collectif dans notre droit du travail et la construction des normes sociales qui devaient aboutir au début de l’automne.

– le sénat lors de la discussion de la loi Macron a voté avec l’avis favorable du gouvernement un amendement emportant création d’une «commission de réforme et de simplification du code du travail », prévoyant due ladite commission « a pour mission de proposer dans un délai d’un an un nouveau Code du travail simplifié en poursuivant les objectifs suivants » : (1) « accroître les possibilités de dérogations aux dispositions du code du travail par un accord collectif «; (2) • simplifier les règles d’exécution et de rupture du contrat, en rendant en particulier certains droits progressifs » ; (3) « instaurer le principe selon lequel, sauf exceptions, las dispositions d’un accord collectif sont applicables nonobstant les dispositions contraires d’un contrat de travail ».

Bon vent à ceux qui porteront la responsabilité de la réforme.

En espérant que celle-ci ne soit pas un simple syndrome réactionnel, une agitation de plus.

Actualités

DÉBAT DE CONSTITUTIONNALITÉ SUR LA BARBARISATION DES INDEMNITÉS DE LICENCIEMENT ISSUE DE LA LOI MACRON

La loi Macron qui sera soumise au Conseil Constitutionnel suscite un vif débat sur la conformité à la constitution du barème des dom-mages et intérêts à la suite d’un licenciement :

– Pascal LOKIEC s’est interrogé sur la constitutionnalité d’un tel barème, au regard non seulement du principe de réparation intégrale mais aussi de l’atteinte à l’économie générale des conventions.

– Denys ROBILIARD remarque que le Conseil constitutionnel n’a jamais consacré le principe de réparation intégrale. Sa décision sur la faute inexcusable en témoigne (Déc. N°2010-8 OPC, 18 juin 2010). Au contraire, le Conseil constitutionnel laisse la place au législateur pour organiser les modalités de la réparation. S’agissant du principe de l’atteinte à l’économie générale des conventions, le député relève que les conditions de la rupture ne changent pas.

LE SUCCÈS DE LA RUPTURE CONVENTIONNELLE NE SE DÉMENT PAS

Elle vient de faire l’objet d’un bilan au titre des accords nationaux interprofessionnels des 11 janvier 20438 et 2013 et d’une étude de Camille SIGNORETTO dont il ressort que :

– 1.8 million de ruptures conventionnelles ont été signées depuis 2008, ce qui correspond à 300 000 par an et une moyenne mensuelle comprise entre 25 000 et 30 000 ruptures conventionnelles.

– le taux de refus est stable de-puis 2013, il est de 6 % et motivé pour les motifs suivants :
•dans 40 % des cas par une indemnité de rupture inférieure à l’indemnité minimum ;
•dans un peu plus de 25 % par le non-respect du délai de rétrac-tation de 15 jours
•dans 2 % des cas par le non-respect des règles d’a.ssistance
•dans 1 % des cas par le constat de l’absence de liberté de consentement ;
•dans un tiers des cas, le refus n’est pas précisé.

Jurisprudence

CESSION DE PME : PLUS D’ACTION EN NULLITÉ POSSIBLE POUR DÉFAUT D’INFORMATION DES SALARIÉS

Le 17 juillet 2015, le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, a jugé contraires à la liberté d’entreprendre les dispositions de la loi n°2014-356 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (dite loi Hamon), qui sanctionnent par la nullité, la cession intervenue en méconnaissance de l’obligation d’information préalable des salariés (entreprises de moins de 250 salariés). L’abrogation des articles correspondants du Code de commerce a pris effet des la publication de la décision au Journal Officiel, soit le 19 juillet 2015.

La loi Macron, adoptée définitivement le 10 juillet dernier, a d’ores et déjà acté la suppression de la sanction de l’annulation de la cession, pour lui substituer une amende civile mais la disposition concernée n’entrera en vigueur qu’à une date fixée par décret, pris dans un délai de six mois suivant la publication de la loi (v. l’actualité n’16874 du 16 juillet 2015).

La décision du 17 juillet 2015 ne remet pas en cause l’obligation pesant sur le cédant d’une participation majoritaire dans une PME, d’informer individuellement chaque salarié de sa volonté de céder, afin de permettre au personnel de présenter une offre d’achat (C. com., art. L 23-10-1 et suivants). Le Conseil constitutionnel la considère, en effet, conforme à la fois à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété.

CONGÉ MATERNITÉ SUIVI D’UN ARRÊT MALADIE : PAS DE REPORT DE LA PÉRIODE DE PROTECTION REL4TIVE

Pendant les quatre semaines suivant l’expiration de la période de suspension du contrat correspondant au congé de maternité, la salariée bénéficie d’une protection dite relative, interdisant à l’employeur de lui notifier un licenciement pour un motif autre qu’une faute grave ou une impossibilité de maintenir le contrat (C. trav. ; art. L 1225-4).

En 2014, la Cour de cassation a innové en prévoyant un report du point de départ de cette protection, lorsque le congé de maternité est immédiatement suivi de la prise de congés payés.

Il était alors permis de s’interroger sur la possibilité d’étendre ce principe de report à d’autres types d’absence survenant dès la fin du congé de maternité (arrêt maladie, congé parental notamment).

Dans un arrêt du 8 juillet 2015, la Cour de cassation ferme toutefois définitivement la voie à une telle extension de sa jurisprudence : contrairement aux congés payés, l’arrêt de travail pour maladie n’a pas pour effet de suspendre la période de protection de quatre semaines et d’en reporter le point de départ à la date de reprise effective du travail.

SEULE LA MAUVAISE FOI PERMET DE LEVER L’IMMUNITÉ DES SALARIÉS SE PLAIGNANT DE HARCÈLEMENT

Pour favoriser la lutte contre le harcèlement en entreprise, tout salarié « relatant » ou « témoignant » de tels agissements, est légalement protégé contre d’éventuelles mesures de rétorsion : il ne peut pas faire l’objet d’une sanction, d’un licenciement ou d’une quelconque mesure discriminatoire en lien avec ces accusations (C. trav., art. L 1152-2 et L 1152-3), à peine de nullité (C. trav. art. L 1152-3 et L 1153-4). Cette immunité ne cède qu’en cas de mauvaise foi, qu’il appartient à l’employeur d’établir. L’objet de cette prouve est alors strictement défini par la jurisprudence, puisqu’il s’agira de démontrer non pas que les accusations sont infondées et les faits non établis, mais que le salarié avait pleinement connaissance, au moment de la dénonciation, de leur caractère mensonger (Cass, Soc. 7 février 2012, n°10- 18.035).

Comme le font apparaître deux arrêts, rendus le 10 juin par la Cour de cassation, cette preuve est particulièrement délicate à rapporter, et le salarié – y compris s’il s’agit d’un apprenti ainsi que le relève l’une de ces décisions, conservera bien souvent le bénéfice de l’immunité de principe.

CDD DE REMPLACEMENT : LE TERME DU CONTRAT EN CAS DE REMPLACEMENT EN CASCADE » PRÉCISÉ

La technique du remplacement « en cascade » ou « par glissement » est admise par la jurisprudence sociale (Cass. Soc. 30 avril 2003, n°01 – 40.037). Elle consiste à muter temporairement, sur le poste du salarié absent, un autre salarié permanent de l’entreprise et à affecter le salarié en CDD sur les fonctions de ce dernier. Ce mode de gestion des absences donne toutefois lieu à plusieurs difficultés pratiques, notamment s’agissant de la mention du nom et de la qualification de la personne remplacée » qui doivent impérativement figurer au contrat sous peine de requalification en COI (C. trav. art. L 242-12). L’administration recommande de préciser, dans le contrat, qu’il s’agit d’un remplacement en cascade et d’indiquer alors le nom et la qualification du salarié réellement absent de l’entreprise (Cire, DRT n°92- 14 du 20 août 1992 ; § 38).

Une seconde difficulté est mise en lumière par une récente affaire tranchée par la Cour de cassation le 24 juin : celle du terme effectif du CDD lorsque celui-ci a été conclu sans terme précis comme le permet la loi (C. trav., art. L 1242-7).

Ce contrat prend-il fin exclusivement au retour du salarié absent de l’entreprise, ou au retour à son poste initial du salarié qui avait provisoirement récupéré ses fonctions par glissement ? Ces deux dates peuvent en effet ne pas coïncider lorsque ce dernier est amené à regagner prématurément son poste. La Haute juridiction se positionne, pour la première fois à notre connaissance, en faveur de la première alternative.

Bulletin rédigé par Maître Philippe BOLJDIAS Avocat au Barreau de PARIS
SCP PHILIPPE & LOUIS BOUDIAS 3 Villa Victor Hugo 75116 PARIS

Bulletin JSA – JUIN 2015

Bulletin rédigé par Maître Jean-Christophe SCHWACH

Cabinet LEXOCIA
5 rue de Berne
67300 SCHILTIGHEIM


Editorial

LE PLAFONNEMENT DES INDEMNITÉS POUR LICENCIEMENT SANS CAUSE RÉELLE ET SÉRIEUSE

La loi pour la croissance et l’activité dite « Loi MACRON » a été adoptée le vendredi 10 juillet dernier.

Ce texte qui sera soumis au contrôle du Conseil Constitutionnel institue, notamment, un barème pour les indemnités versées dans le cadre des licenciements reconnus sans cause réelle et sérieuse par le Conseil de Prud’hommes.

L’idée est d’encadrer les dommages et intérêts qu’un employeur pourrait être amené à verser lors d’un litige prud’homal et de lui donner plus de visibilité dans un contentieux à l’issue souvent incertaine.

Le gouvernement part du postulat que les chefs d’entreprise seraient plus enclins à embaucher en connaissant à l’avance le risque qu’ils encourent si les juges devaient requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En d’autres termes, le risque prud’homal ne doit plus être un frein à l’embauche.

Le projet de loi avait été accueilli de manière plutôt négative et les premières réactions des syndicats et des conseillers prud’homaux ont été particulièrement hostiles.

Il est vrai que le texte prévoit des planchers et des plafonds en fonction des effectifs de l’entreprise et de l’ancienneté du salarié qui ne sont guère favorables pour les salariés des petites entreprises ou pour ceux qui ont moins de 2 ans d’ancienneté.

Certains conseillers prud’homaux ont manifesté devant les juridictions en soutenant que les montants dérisoires accordés vont décourager les salariés qui ne saisiront plus le Conseil de Prud’hommes.

Un deuxième argument était mis en avant : s’il n’y a plus de risque pour l’employeur à licencier, le rôle protecteur du droit du travail était totalement mis à mal.

Ces positions, sans doute excessives, ont néanmoins le mérite de souligner que ce nouveau barème va modifier le rôle des conseillers prud’homaux qui ne pourront plus prendre en compte les critères habituels pour l’évaluation du préjudice subi par le salarié.

Il faut rappeler que, jusqu’à présent, la sanction de l’absence de cause réelle et sérieuse variait déjà selon la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié mais le juge avait plus de liberté pour fixer les dommages et intérêts qui n’étaient pas encadrés.

Le Code du Travail prévoyait que pour les salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était au minimum égale à 6 mois de salaire, les juges allant très souvent au-delà de ce montant en estimant que le préjudice excédait ce minimum.

Pour les salariés ayant moins de 2 ans d’ancienneté et / ou les salariés d’une entreprise de moins de 11 salariés, aucun montant minimal ou maximal n’est fixé et le juge a une grande liberté pour déterminer l’indemnité en fonction du préjudice.

La loi MACRON met fin à cet aléa avec l’encadrement des indemnités selon le barème suivant :

  • Indemnité (en mois de salaire pour un salarié d’une entreprise d’au moins 20 salariés :

– Moins de 2 ans d’ancienneté : Maximum 3 mois
– De 2 ans à moins de 10 ans d’ancienneté : Minimum 2 mois  – Maximum 6 mois
– A partir de 10 ans d’ancienneté : Minimum 2 mois – Maximum 6 mois

  • Indemnité (en mois de salaire) pour un salarié d’une entreprise de 20 à 299 salariés :

– Moins de 2 ans d’ancienneté : Maximum 4 mois
– De 2 ans à moins de 10 ans d’ancienneté : Minimum 4 mois – Maximum 10 mois
– A partir de 10 ans d’ancienneté : Minimum 4 mois – Maximum 20 mois

  • Indemnité (en mois de salaire) pour un salarié d’une entreprise d’au moins 300 salariés :

– Moins de 2 ans d’ancienneté : Maximum 4 mois
– De 2 ans à moins de 10 ans d’ancienneté : Minimum 6 mois – Maximum 12 mois
– A partir de 10 ans d’ancienneté : Minimum 6 mois – Maximum 27 mois

Il convient de préciser que ces fourchettes s’appliqueront également :

• en cas de résiliation judiciaire du contrat,
• lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat.

Face à ce barème, le juge ne retrouvera sa pleine liberté (avec la possibilité de dépasser les plafonds) que s’il estime qu’une faute grave de l’employeur est caractérisée par :

• des faits de harcèlement moral ou sexuel,
• un licenciement discriminatoire ou consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle homme – femme ou de corruption,
• la violation du droit de grève, du statut protecteur des représentants du personnel, du statut lié à la maternité ou à la paternité, des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle, d’inaptitude,
• une atteinte à une liberté fondamentale.

Cette disposition de la loi va sans doute conduire à une nouvelle forme de contentieux dans la mesure où le salarié licencié va tenter de rattacher la rupture à un fait de harcèlement ou de discrimination pour sortir du barème d’indemnisation.

On peut également penser que les avocats et défenseurs syndicaux vont faire preuve d’imagination pour solliciter la réparation de préjudices distincts (préjudice moral, perte d’une chance …) donnant ainsi une nouvelle orientation aux contentieux prud’homaux.

En encadrant les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la loi MACRON va donner des garanties et des repères sur le risque encouru mais elle va également pousser les salariés et leurs conseils à aller sur d’autres terrains pour contourner ces limites.

Seule la pratique de ce nouveau dispositif permettra de mettre en lumière ses aspects négatifs et d’apprécier son véritable impact sur la courbe des embauches.

Lors d’une rupture, il s’agit toujours en définitive d’une question de gestion du risque et, plus précisément, d’évaluer l’indemnité à verser en cas de condamnation devant le Conseil de Prud’hommes.

Les minima et les maxima seraient désormais fixés par la loi, ce qui devrait rassurer les employeurs et les encourager à recruter plus facilement.

Encadrer les indemnités de rupture pour développer l’emploi quel paradoxe !

Soyons optimiste et écartons la thèse de ceux qui estiment que cette réforme incitera davantage les employeurs à licencier qu’à embaucher.

Jurisprudence

La clause de non concurrence

Jurisprudence : La renonciation à la clause de non concurrence en cas de dispense de préavis, Cass. Soc. 21 janvier 2015, n° 13-24471.

L’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit s’il entend renoncer à la clause de non-concurrence de faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise nonobstant toute stipulation contraire.

Il convient donc d’être particulièrement vigilent sur la date de renonciation à la clause de non concurrence, dès lors, que la rupture intervient sans préavis ou avec dispense de préavis.

Renonciation à la clause de non-concurrence en cours d’exécution du contrat de travail Cass. Soc. 11 mars 2015, n° 13-22257.

L’employeur ne peut, sauf stipulation contraire, renoncer unilatéralement à la clause de non-concurrence au cours de l’exécution du contrat de travail.

Dans cette affaire, la clause était rédigée ainsi : « L’interdiction de concurrence peut-être levée ou réduite par l’entreprise par lettre RAR au plus tard dans les 8 jours suivants la notification de la rupture du contrat de travail ».

Pour la Cour de Cassation, cette clause fixe un délai de renonciation à compter de la rupture du contrat alors que la renonciation par l’employeur est intervenue au cours de l’exécution dudit contrat.

Dès lors, la Cour Suprême estime que la contrepartie à la clause de non-concurrence reste due.

Modulation de la contrepartie pécuniaire selon le mode de rupture, Cass. Soc. 9 avril 2015, n° 13-25847

La clause qui minore la contrepartie financière de la clause de non-concurrence dans le cadre d’un mode déterminé de rupture du contrat de travail est réputée non écrite.

Dans le cas d’espèce, la contrepartie était fixée à 25 % de la rémunération mensuelle en cas de licenciement et à 10 % en cas de démission.

La Cour de Cassation a censuré cette disposition contractuelle.

La clause de non concurrence reste valable mais la minoration n’est pas applicable.

Les congés payés

Le sort des congés annuels non pris au-delà de la durée minimale de 4 semaines, Cass. Soc. 12 mai 2015, n°13-20349

La Cour de Cassation considère que les congés non pris en plus des congés payés annuels d’une durée minimale de 4 semaines ne peuvent donner lieu à une indemnisation que si le salarié rapporte la preuve qu’il n’a pu les prendre du fait de l’employeur.

A défaut, l’employeur peut faire application de la règle : congés pas pris, congés perdus.

Cette disposition doit être appliquée avec précaution au regard de la position beaucoup moins restrictive prise par la CJCE.

La durée du travail

Départ du salarié et paiement des jours de RTT, Cass. Soc. 18 mars 2015, n° 13-13369

Sauf dispositions conventionnelles contraires, un salarié qui quitte l’entreprise ne peut revendiquer le paiement d’une indemnité compensant les jours de RTT non pris sauf à prouver que c’est l’employeur qui l’empêchait de les prendre.

Il convient de rappeler que les jours de RTT doivent être pris, même si la loi ne l’a pas précisé, au cours d’une période de 12 mois consécutifs.

Dans cette affaire, le salarié a voulu faire une assimilation entre les jours de RTT et les congés payés.

Il a donc demandé à pouvoir bénéficier d’une indemnité compensatrice des jours de RTT non pris au même titre que l’indemnité compensatrice de congés payés pour les congés non pris.

Pour la Cour de Cassation, les jours de RTT ne peuvent être assimilés à des congés.

Dans ces conditions, le salarié ne peut revendiquer le paiement d’une indemnité compensant les jours de RTT non pris.

Le port du voile

La Chambre Sociale a saisi la Cour de Justice de l’Union Européenne sur une nouvelle affaire concernant le port du voile.

Dans cette affaire, une salariée engagée en qualité d’Ingénieur et mise à disposition par la Société de Conseil auprès d’une entreprise cliente.

Cette entreprise demande à l’employeur que la salariée intervenant ne porte plus le voile lors de ses prochaines interventions.

Suite à son refus de retirer son voile, la salariée est licenciée pour faute.

Pour la Cour d’Appel de PARIS, ce licenciement n’est pas discriminatoire et reposait sur une cause réelle et sérieuse.

La Cour d’Appel considère que le but recherché par une entreprise commerciale est de réaliser son objet social en fournissant à ses clients des produits, des prestations ou des services lui donnant satisfaction.

Pour ce faire, elle doit tenir compte de la diversité des clients et de leur conviction.

Elle est donc naturellement amenée à imposer au salarié qu’elle envoie au contact de la clientèle une obligation de discrétion qui respecte les obligations de chacun.

Pour la Cour d’Appel, la restriction était bien donc justifiée par rapport à la nature de la tâche et proportionnée au but recherché.

La salariée s’est pourvue en cassation.

La Cour de Cassation a décidé de transmettre une question préjudicielle à la CJUE, à savoir :

« Est-ce que constitue une négligence professionnelle essentielle et déterminante en raison de la nature de l’activité professionnelle ou des conditions de son exercice, le souhait d’un client d’une société de conseil informatique de ne plus avoir les prestations informatiques de cette société assurées par une salariée ingénieur d’études portant un voile islamique ? ».

La Cour de Cassation se remet donc à l’appréciation de la Cour de Justice de l’Union Européenne pour trancher cette question.

La durée du travail

Forfait illicite : la condamnation pour travail dissimulé n’est pas automatique, Cas. Soc. 16 juin 2015, n° 14-16953

La Cour de Cassation a rappelé que l’indemnité forfaitaire de travail dissimulé ne peut être accordée que si le caractère intentionnel de la dissimulation est démontré.

Il était question dans cette affaire d’un salarié bénéficiant d’un forfait annuel en heures par application d’un accord collectif qui a été jugé illicite.

Le salarié a saisi la Cour d’Appel de PARIS pour contester la validité de la convention de forfait afin d’obtenir un rappel d’heures supplémentaires ainsi que l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

La Cour d’Appel de PARIS a fait droit aux demandes du salarié.

La Cour de Cassation a censuré la décision concernant la condamnation pour travail dissimulé en affirmant que le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule application d’une convention de forfait illicite.

La Cour de Cassation exige des juges du fond qu’ils caractérisent à cette fin la volonté délibérée de l’employeur de dissimuler les heures de travail réellement effectuées.

La géolocalisation

Dans une délibération du 4 juin 2015, la CNIL pose une interdiction globale de géolocalisation hors du temps de travail.

Notamment lors des trajets domicile-travail ou des pauses.

L’objectif de la CNIL est de limiter les risques d’abus dans l’utilisation de la géolocalisation.

La CNIL a prévu des cas de recours limités.

Ainsi, le recours à la géolocalisation peut désormais être justifié par le contrôle du respect des règles d’utilisation du véhicule.

Ce nouveau cas s’applique sous réserve de ne pas collecter de données de localisation en dehors du temps de travail du conducteur.

La CNIL apporte également d’autres précisions :

– La géolocalisation peut servir à justifier de la réalisation d’une prestation auprès d’un client ou d’un donneur d’ordre.

– En matière de sûreté ou de sécurité de l’employé lui-même ou des marchandises ou du véhicule dont il a la charge, la CNIL ajoute expressément la lutte contre le vol du véhicule.

– Concernant le suivi du temps de travail, il est possible seulement, à titre accessoire, lorsque ce suivi ne peut être réalisé par d’autres moyens. La CNIL ajoute une réserve, cela ne doit pas conduire à collecter des données de localisation en-dehors du temps de travail des salariés concernés.

Ainsi, la CNIL prévoit une interdiction globale de collecter des données hors du temps de travail.
Bulletin rédigé par Maître Jean-Christophe SCHWACH Cabinet LEXOCIA
5 rue de Berne – 67300 SCHILTIGHEIM

Bulletin JSA – MAI 2015

Bulletin rédigé par Maître François-Xavier GALLET

Cabinet GALLET
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86000 POITIERS


Éditorial

COMPTE PÉNIBILITÉ

Vers un « choc de simplification » ?

Le gouvernement avait promis aux entreprises un choc de simplification.

Les entreprises ont scruté l’horizon et ont vu venir un festival d’obligations nouvelles : la généralisation de la prévoyance et des complémentaires santé (loi du 14 juin 2013), l’obligation de tenir des entretiens individuels réguliers avec les salariés (loi du 5 mars 2014), la modification des droits à la formation avec la suppression du DIF et la création du compte personnel de formation (loi du 5 mars 2014), l’obligation d’informer les salariés en cas de cession d’entreprise (loi du 31 juillet 2014), et, pour couronner le tout, la mise en application à partir du 1er janvier 2015 du compte personnel de prévention de la pénibilité (loi du 20 janvier 2014).

Entrée en vigueur le 1er janvier 2015, avec quatre premiers facteurs de pénibilité (travail de nuit, travaille en équipes successives alternantes, travail répétitif, activités en milieu hyperbare), cette dernière mesure devait être complétée par six nouveaux facteurs à prendre en compte au 1er janvier 2016.

La mise en œuvre des fiches individuelles de prévention des expositions a suscité l’inquiétude légitime des chefs d’entreprise, d’autant plus que les moyens de mise en œuvre et de communication ne sont pas définis et sont soumis à la modification des logiciels de paye prenant en compte ces éléments pour leur transmission.

À défaut de pouvoir dire que le rouleau compresseur de la simplification s’est mis en marche, les entreprises peuvent espérer que le frein à la complexification commence enfin à être (timidement) utilisé.

En effet, il vient d’être décidé de repousser au 1er juillet 2016 l’entrée en vigueur des six facteurs de pénibilité restants et la possibilité, lorsqu’il existe des référentiels de branches identifiant les postes, les métiers ou les situations de travail exposés aux facteurs de pénibilité, l’employeur pourra les appliquer pour évaluer l’exposition de ses salariés.

Il n’aura, dans ce cas-là, plus de mesures individuelles à mettre en œuvre pour ces facteurs.

L’établissement et la transmission des fiches individuelles ne reposeront alors plus sur l’employeur, mais sur la caisse de retraite qui sera chargée d’informer les salariés sur leur exposition et sur les points dont ils bénéficient à ce titre.

Il ne reste plus à espérer que les branches professionnelles identifient ces postes, métiers ou situations de travail exposés aux facteurs de pénibilité, pour simplifier la tâche des employeurs.

Mais, quoiqu’il en soit, une hirondelle n’a jamais fait le printemps.

Actualités

ASSISTANCE LORS DE L’ENTRETIEN PRÉALABLE

L’interprétation extensive des juridictions administratives
Le Code du Travail prévoit en son article L. 1232-4 la possibilité pour le salarié d’être assisté durant l’entretien préalable au licenciement par un salarié membre de l’entreprise et, « lorsqu’il n’y a pas d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative ».

Les articles L. 1232-7 et suivants du Code du Travail déterminent le statut du conseiller du salarié.

Le rôle du conseiller du salarié est de permettre aux salariés de bénéficier du concours d’une personne réputée dégagée de toute pression envisageable de la part de l’employeur.

Les salariés titulaires d’un mandat de représentation du personnel sont bénéficiaires d’un statut très protecteur contre le licenciement et par conséquent, l’absence de salarié bénéficiant de cette protection est ainsi compensée, de par la volonté du législateur, par cette intervention externe.

Pour l’administration, le champ d’application des dispositions relatives au conseiller du salarié visent en premier lieu l’assistance du salarié qui est employé dans une entreprise dépourvue d’institution représentative du personnel.

Il y a donc lieu de considérer qu’une entreprise est dépourvue d’institution représentative du personnel lorsqu’il n’existe dans cette entreprise ni comité d’entreprise, ni délégué syndical, ni délégué du personnel, ni CHSCT (Circulaire DRT 16 du 5 septembre 1991, BOMT n° 91/24, page 91).

L’interprétation de ce texte a donné lieu à quelques décisions de jurisprudence mais, à notre connaissance, la Cour de Cassation n’a pas eu l’occasion de se prononcer sur la situation très particulière du salarié dont le licenciement est envisagé et qui se trouve être l’unique représentant du personnel de l’entreprise.

Par définition, une telle situation ne peut concerner que des petites entreprises dans lesquelles une seule personne a la qualité de délégué du personnel.

La lecture littérale du Code du Travail laisse à penser que, compte tenu de l’existence d’un représentant du personnel, celui-ci ne peut se faire assister que par un salarié de l’entreprise.

Cependant, la juridiction administrative a eu une interprétation différente.

Ainsi, dans une décision du 9 décembre 2013, la Cour Administrative d’Appel de Paris a considéré, au visa de l’article 1232-4 du Code du Travail que « lorsque le salarié concerné est le seul représentant du personnel dans l’entreprise, sa situation doit être assimilée à celle dans laquelle se trouve tout salarié dont l’entreprise est dépourvue d’institution représentative du personnel ; que dans cette hypothèse, l’omission, dans la lettre de convocation adressée par l’employeur, de l’indication de la faculté de se faire assister par un conseiller du salarié entache d’illégalité la décision administrative autorisant le licenciement du salarié » (Cour Administrative d’Appel de Paris, 8ème Chambre, 9 décembre 2013, n° 13PA01670, 13PA01791) ; (Voir également Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 15 mars 2011, Institution Guyanaise de Retraite Complémentaire, n° 10BX01418).

Le texte ne prévoit pas cette situation et, d’un point de vue formel, la décision peut paraître contraire à la lettre, les institutions  représentatives du personnel existant.

Toutefois, l’esprit de la loi est la possibilité pour un salarié dont le licenciement est envisagé de se faire assister durant l’entretien préalable par une personne pouvant bénéficier soit d’une protection contre licenciement au titre d’un mandat de représentation du personnel dans l’entreprise, soit, à défaut, par un conseiller extérieur. La juridiction administrative tire logiquement les conclusions du fait que, en dehors du salarié dont le licenciement est envisagé, aucune autre personne de l’entreprise ne peut bénéficier d’une protection contre le licenciement et peut donc être soumise à des pressions de son employeur.

Même si la situation peut paraître exceptionnelle, il est indispensable, tout particulièrement dans les microentreprises, d’être vigilant sur cette question lorsque la situation se produit pour éviter une annulation de l’autorisation administrative de licenciement par le Ministre ou par le Tribunal Administratif si l’Inspecteur du Travail n’a pas soulevé cette question, et éviter ainsi ce motif de refus d’autorisation de licenciement ou son annulation.

Par ailleurs, nous pouvons aussi nous poser la question de la limite de cette analyse.

En effet, si lors d’une procédure de licenciement, l’unique représentant du personnel est absent (période de congés par exemple, immobilisation, ou encore déplacement éloigné,…), la juridiction ne sera-t-elle pas tentée, sur la base du même raisonnement, de considérer que les règles d’assistance n’ont pas été respectées si la possibilité d’une assistance extérieure n’a pas été proposée.

INAPTITUDE À TOUT POSTE DANS L’ENTREPRISE ET OBLIGATION DE RECLASSEMENT

Vers la fin de l’hypocrisie ?

L’obligation pour l’employeur de rechercher un emploi de reclassement est étendue puisqu’elle vise toutes les inaptitudes, qu’elles soient temporaires ou définitives, partielles ou totales (Cass. Soc., 22 mai 1995, no 93-44-721).

De même, et contre toute logique, lorsque l’avis d’inaptitude vise tout emploi dans l’entreprise, l’employeur n’est pas pour autant libéré de son obligation de reclassement vis-à-vis du salarié. La Cour de cassation affirmait jusqu’à présent très clairement ce principe (Cass. Soc., 23 octobre 2001, no 99-40.126 ; Cass. Soc., 19 mai 2004, no 02-45.166 ; Cass. Soc., 26 octobre 2010, no 09-42.284).

Selon la logique de la Cour de cassation, lorsque le médecin émet un avis d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise, cela ne signifie pas que le salarié soit dans l’impossibilité d’exercer un emploi ou une activité quelconque, mais simplement que le médecin du travail juge qu’il ne peut exercer, sans danger pour sa santé, aucun des emplois existant à ce moment donné dans l’entreprise.

Cependant, cet avis médical doit permettre à l’employeur de rechercher un emploi de reclassement, en sollicitant, en complément de l’avis d’inaptitude, les conclusions écrites du médecin du travail et ses indications sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des taches existantes dans l’entreprise avec mise en œuvre de mesures comme la mutation, la transformation de poste de travail ou l’aménagement du temps de travail, malgré l’avis d’inaptitude à tout emploi (articles L1226-2 et 10 du code du travail). En aucun cas, l’avis ne doit être considéré comme une preuve de l’impossibilité de reclassement. (Cass. Soc., 28 mars 2006, no 04-41.266 ; Cass. Soc., 26 octobre 2010, no 09-42.284).

En conséquence, lorsque l’avis du médecin a conclu à l’inaptitude du salarié à tout emploi dans l’entreprise et à l’impossibilité de son reclassement dans celle-ci, l’employeur qui a licencié le salarié doit prouver qu’il s’est trouvé dans l’impossibilité de le reclasser (Cass. Soc., 7 juillet 2004, no 02-43.350).

Il semblerait que la Cour de cassation ait désormais une approche un peu plus pragmatique de la situation de l’employeur et de l’inutilité de ce qu’il faut bien appeler « la mascarade de la procédure de reclassement ».

Dans une décision récente, la Cour a jugé : « attendu que, sans dispenser, au vu de l’avis d’inaptitude avec danger immédiat du 24 janvier 2011, l’employeur de son obligation de recherche de reclassement, la cour d’appel, qui a relevé que celui-ci avait le 26 janvier suivant, interrogé le médecin du travail sur le reclassement éventuel de la salariée notamment en termes d’organisation du travail, d’aménagement de poste et de changement d’affectation, en envisageant par ailleurs un poste précis susceptible d’être proposé, a constaté que ce médecin avait répondu le 3 février 2011 en excluant tout poste dans l’entreprise et tout travail, a pu en déduire que cet employeur était dans l’impossibilité de reclasser effectivement la salariée » (Cass. Soc. 25 mars 2015, n° 13-20.506 – Union locale CGT de Chatou).

Certes, il s’agit d’une première décision et d’un arrêt de rejet, mais il n’en demeure pas moins que lorsque le médecin du travail confirme à l’employeur qui sollicite ses conclusions écrites sur les possibilités de reclassement, que le salarié ne peut occuper aucun des emplois de l’entreprise, l’employeur se trouve dégagé de toute obligation de recherche de reclassement dans l’entreprise.

Bulletin rédigé par Maitre François-Xavier GALLET, Cabinet GALLET
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Bulletin JSA – AVRIL 2015

Bulletin rédigé par Maîtres POULET-CALMET et FERRANTELLI

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Éditorial

LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL DES SALARIÉS PROTÉGÉS : CONSÉQUENCES INDEMNITAIRES DES DÉCISIONS ADMINISTRATIVES SUR LA PROCÉDURE PRUD’HOMALE

Indépendants dans leurs mandats mais subordonnés dans leur travail, les salariés «protégés» qui exercent des fonctions de représentant du personnel ou syndical dans l’entreprise, ou qui concourent, à l’extérieur, à défendre les droits d’autres salariés, bénéficient d’une procédure spéciale de licenciement interdisant à l’employeur de mettre un terme à leur contrat sans au préalable solliciter régulièrement de l’inspecteur du travail l’autorisation de rompre la relation de travail.

La compétence de l’autorité administrative est exclusive et d’ordre public ; elle s’impose donc aux parties qui ne peuvent y renoncer, y compris par voie d’accord ; le salarié reste ainsi parfaitement recevable à attaquer une autorisation de licenciement, même s’il a préalablement accepté le bénéfice d’un départ négocié en signant une transaction. (CE 2 février 1996, n° 152406, Sté Établissements Crocquet.)

De la même manière, conformément au principe de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire est tenu par la décision administrative de l’inspecteur du travail ou, sur recours hiérarchique ou contentieux, du Ministre du travail ou du Tribunal administratif, ayant considéré que la procédure (légale et/ou conventionnelle) de licenciement avait été appliquée et que les faits énoncés dans la demande d’autorisation justifiaient la rupture.

Se pose alors la question de l’indemnisation du salarié protégé au regard de la décision prise par l’administration.

1) LE POUVOIR D’INDEMNISATION DU JUGE JUDICIAIRE EN PRÉSENCE D’UN LICENCIEMENT AUTORISÉ :

En pareille hypothèse, le Conseil de prud’hommes ne peut déclarer un tel licenciement autorisé sans cause réelle et sérieuse.

En revanche, le salarié peut contester devant la juridiction prud’homale le degré de gravité de la faute retenue dans le cadre de son licenciement disciplinaire et solliciter, le cas échéant, à ce titre, le bénéfice de ses indemnités de fin de contrat. (Cass. soc. 1er juin 1994 n° 92-40.315, Coquelle c/ Sarl Hertzog).

Par ailleurs, lorsqu’un licenciement a été notifié à la suite d’une autorisation administrative accordée à l’employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire formée par le salarié même si sa saisine était antérieure à la rupture. (Cass. soc. 29 septembre 2010 n° 09-41.127, Morin c/ Sté LV fruit ; Cass. soc. 28 mai 2013 n° 12-15.329, Sté Ener’Gym Center c/ Galant).

En revanche, en présence d’une situation de harcèlement moral, le juge judiciaire retrouve son plein pouvoir d’indemnisation.

Ainsi, après avoir dans un premier temps rappelé que l’autorisation de licenciement pour inaptitude physique accordée par l’autorité administrative ne privait pas le salarié protégé du droit de demander devant le juge judiciaire réparation du préjudice causé par les faits de harcèlement à l’origine de son inaptitude (Cass. soc. 27 novembre 2013 n° 12-20.301, Association Ogec Saint-Laurent-la-Paix-Notre-Dame c/ Wurtz), la Cour de cassation a finalement retenu que « l’autorisation de licenciement donnée par l’inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l’origine de l’inaptitude lorsqu’il l’attribue à un manquement de l’employeur à ses obligations ».

En d’autres termes, même autorisé par l’autorité administrative, le licenciement pour inaptitude physique d’un salarié protégé peut être annulé par le juge prud’homal lorsque cette inaptitude résulte d’un harcèlement moral. (Cass. soc. 15 avril 2015, n° 13-21306 et 13-22469).

2) LE POUVOIR D’INDEMNISATION DU JUGE JUDICIAIRE EN CAS DE LICENCIEMENT D’UN SALARIÉ PROTÉGÉ SANS AUTORISATION DE L’ADMINISTRATION :

Le Conseil de prud’hommes retrouve en la matière un pouvoir de sanction beaucoup plus étendu et, s’il en était besoin, dissuasif.

2-1) Tout d’abord, si l’employeur a régulièrement sollicité et obtenu l’autorisation de licencier le salarié protégé avant de notifier la rupture, mais qu’in fine cette décision a été retirée ou annulée sur recours hiérarchique ou contentieux, l’indemnisation accordée au salarié, qu’il demande ou non sa réintégration, ne sanctionnera que l’irrégularité du licenciement ainsi mis en cause, sans que les motifs invoqués à l’appui de la rupture ne soient nécessairement invalidés.

• Conformément aux dispositions de l’article L 2422-1 du Code du travail, le salarié a tout d’abord le droit, s’il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision (sous peine d’irrecevabilité), d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent, et dans son mandat.

La réintégration du salarié protégé, en cas d’annulation de l’autorisation de licenciement, n’est cependant pas automatique. Pour être réintégré l’intéressé doit en faire la demande dans les conditions légales. Peu importe également que la décision d’annulation ne soit pas encore définitive au moment où le salarié présente sa requête. L’employeur ne saurait alors s’y opposer, sauf disparition de l’entreprise ou impossibilité absolue de réintégrer.

Dès lors, le salarié a droit à l’indemnisation du préjudice subi au cours de la période entre le licenciement et la réintégration si celle-ci a été demandée dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision d’annulation de l’autorisation de licenciement. Doivent donc être pris en compte les revenus de remplacement perçus par le salarié pendant cette période (salaires, allocations POLE EMPLOI, pensions de retraite et même pensions d’invalidité : Cass. soc. 29 septembre 2014 n° 13-15.733, Sari c/ Sté Elior entreprises).

• Si le salarié dont l’autorisation de licenciement est annulée ne sollicite pas sa réintégration, il peut, en plus de la réparation de son préjudice résultant du caractère irrégulier de son licenciement, prétendre éventuellement au versement de ses indemnités de rupture.

Il peut également se voir allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse si le licenciement en était dépourvu au moment de son prononcé, ce qu’il appartient au juge prud’homal de déterminer. (Cass. soc. 18 décembre 2013 n° 12-24.586, Sté Synergie c/ da Silva).

En effet, il n’y a pas d’automaticité entre l’annulation d’une autorisation de licenciement et la reconnaissance d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf si l’autorisation a été annulée au motif que les faits n’étaient pas établis ou qu’ils ne constituaient pas une faute d’une gravité suffisante.

2-2) Par ailleurs, il est constant que le licenciement d’un salarié protégé en violation du statut protecteur (que l’autorisation de licenciement n’ait pas été demandée ou qu’elle ait été sollicitée sans être obtenue au moment de la notification de la rupture), est nul.

Peu importe qu’in fine, il soit reconnu que cette autorisation n’était pas requise, ou qu’elle soit adressée a posteriori à l’employeur ; encore récemment, la Cour de cassation a rappelé que l’annulation par le tribunal d’instance de la désignation d’un délégué syndical, quel qu’en soit le motif, n’a pas d’effet rétroactif sur le statut protecteur. (Cass. soc. 16 décembre 2014 n° 13-15.081, Sté Sud service c/ Ouenniche). Est donc prononcé en violation de ce statut le licenciement d’un salarié sans autorisation administrative à une date antérieure à l’annulation de sa désignation.

• Comme précédemment, le salarié a la faculté de demander sa réintégration dans l’entreprise et le cas échéant, dans son mandat, sous réserve, simplement, de présenter sa demande pendant la période de protection.

Dans ce cas, il a droit au versement d’une indemnité forfaitaire égale au montant total de la rémunération brute qu’il aurait perçue entre son licenciement et sa réintégration ; l’employeur ne peut ainsi déduire les salaires éventuellement perçus par le salarié durant cette période, les indemnités journalières servies par la sécurité sociale, les pensions de retraite versées et les allocations chômage dont l’intéressé a bénéficié. Cette indemnité est alors soumise aux cotisations sociales et d’assurance chômage. (Cass. 2e civ 12 février 2015 n° 14-10.886, Urssaf des Pays de la Loire c/ Sté Claas réseau agricole).

Toutefois, dans ses rapports avec l’organisme d’assurance chômage, le salarié protégé dont le licenciement est annulé pour avoir été prononcé sans autorisation administrative ou malgré un refus d’autorisation n’est pas fondé à cumuler les allocations de chômage avec ses rémunérations ou une indemnité équivalente à celles-ci. Ainsi, lorsque le salarié a obtenu la condamnation de son employeur au paiement d’une indemnité compensatrice de salaire pour la période comprise entre son licenciement nul et sa réintégration, le paiement des allocations de chômage versées par POLE EMPLOI au titre de cette période est indu et celles-ci doivent donc être remboursées par le salarié (Cass. soc. 19 novembre 2014 n° 13-23.643, Besnainou c/ Pôle emploi Picardie).

• Si le salarié ne demande pas sa réintégration, ce dernier a non seulement le droit d’obtenir au titre de la méconnaissance du statut protecteur, le montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre son éviction et l’expiration de la période de protection (sans déduction des revenus de remplacement), mais également ses indemnités de rupture ainsi qu’une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au minimum égale à celle prévue par l’article L 1235-3 du Code du travail (fixée six mois de salaire).

La liberté dont disposent les tribunaux judiciaires concernant l’indemnisation accordée aux salariés protégés dont le licenciement est nul est donc relative, d’autant que la Cour de cassation s’oriente de plus en plus vers une uniformisation des durées de protection prises en compte pour la détermination de l’indemnité forfaitaire qui leur est accordée au titre de la violation du statut protecteur. Il sera ainsi rappelé que la Cour de cassation applique un plafond de 30 mois de salaires pour les salariés administrateurs de mutuelle (Cass. soc. 1er juin 2010 n° 09-41.507), pour les médecins du travail (avis Cass. 15 décembre 2014 n° 15013) et désormais pour les délégués du personnel (Cass. soc. 15 avril 2015 n° 13-24.182 et 13-27.211 ; solution qui vraisemblablement ne manquera pas d’être appliquée également aux membres du Comité d’entreprise).

Actualité

LE MONTANT DE L’INDEMNITÉ DE NON-CONCURRENCE NE PEUT VARIER EN FONCTION DU MODE DE RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Par une décision du 9 avril 2015, la Cour de cassation réitère sa jurisprudence interdisant de faire varier le montant de la contrepartie en fonction du mode de rupture du contrat.

Dans cet arrêt, la contrepartie financière était fixée à 25 % en cas de licenciement et à 10 % en cas de démission et le contrat avait pris fin au moyen d’une rupture conventionnelle.

La Cour d’appel avait appliqué la minoration de l’indemnité de non-concurrence prévue en cas de démission, considérant que la rupture conventionnelle intervenait à l’initiative du salarié.

La Cour de cassation censure cet arrêt au motif suivant : « Attendu que pour fixer la contrepartie financière de la clause de non-concurrence au montant prévu en cas de démission, l’arrêt énonce que le salarié qui démissionne et celui qui signe une rupture conventionnelle manifestent l’un et l’autre une même intention de quitter l’entreprise; Qu’en statuant ainsi, alors que doit être réputée non écrite la minoration par les parties, dans le cas d’un mode déterminé de rupture du contrat de travail, de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence, la cour d’appel, qui a refusé de faire application de la contrepartie de 25 %, laquelle n’est pas susceptible de réduction par le juge et ouvre droit à congés payés, a violé le principe et le texte susvisé. »

Ce n’est pas la première fois que la Haute Juridiction se prononce sur cette question. Elle avait déjà jugé de la même manière dans des hypothèses où le montant de l’indemnité de non-concurrence avait été minoré en cas de licenciement pour faute (Cass. soc. 8-4-2010 n° 08-43.056) ou de démission (Cass. soc. 25-1-2012 n° 10-11.590). Mais cette fois, elle étend cette solution à l’ensemble des modes de rupture du contrat de travail, sans les distinguer, qu’elle soit à l’initiative de l’employeur ou du salarié.

Cette solution reste cependant logique : dès lors que l’obligation de non-concurrence est similaire, la contrepartie de l’entrave au libre exercice d’une activité professionnelle doit être la même, que le salarié ait été licencié, qu’il ait démissionné ou qu’il ait signé une rupture conventionnelle. Le montant d’indemnisation le plus favorable au salarié sera alors retenu.
Bulletin rédigé par SELARL POLI-MONDOLONI-ROMANI & ASSOCIES
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Bulletin JSA – MARS 2015

Bulletin rédigé par Maître LEDERMANN

AFC LEDERMANN
50 rue de Lalande
33000 BORDEAUX


Éditorial

LA SITUATION FINANCIÈRE DU SALARIE PENDANT LA PROCÉDURE DE RECLASSEMENT

I – La situation du salarié dans le mois qui suit la deuxième visite constatant son inaptitude physique.

Deux situations sont à distinguer :

Si l’inaptitude du salarié est non professionnelle

Durant le mois imparti pour effectuer la recherche de reclassement, le salarié ne perçoit pas son salaire si son inaptitude est d’origine non professionnelle. (Cass.soc 10 novembre 1998 n°96-44067).

Dés lors, plusieurs situations sont envisageables pour permettre au salarié de percevoir un « revenu de remplacement » :

– L’entreprise dispose d’un compte épargne temps, permettant ainsi au salarié d’être indemnisé sur cette période s’il a acquis des droits suffisants. Il est ainsi conseillé aux employeurs de vérifier les termes de leur accord d’entreprise éventuel si une telle hypothèse est envisagée, l’employeur peut dans ce cas proposer au salarié d’être indemnisé dans le cadre de ce dispositif.

– L’employeur propose au salarié de prendre des congés payés pour percevoir un revenu de remplacement sur cette période. En revanche, il est fortement déconseillé d’imposer la prise de congés payés.

– Le salarié retourne voir son médecin et se voit prescrire un nouvel arrêt maladie.

Attention, il est important d’avoir à l’esprit que cela ne suspend pas, pour autant, la procédure de recherche de reclassement, qui court à compter de la deuxième visite médicale confirmant l’inaptitude définitive.

Si l’inaptitude est professionnelle

Dans pareil cas, le salarié bénéficie de l’indemnité temporaire d’inaptitude (ITI) (L 433-1 alinéa 5 du Code de la sécurité sociale).

Cette indemnité sera versée par l’organisme de sécurité sociale.

Le formalisme de cette procédure est précisé dans l’article D 433-3 du Code de la sécurité sociale. Le salarié concerné doit adresser sans délai un formulaire de demande à la CPAM dans lequel le médecin du travail fait état d’un lien possible entre l’inaptitude et l’accident de travail. Un volet de ce formulaire est adressé par le salarié à l’employeur. Le salarié conserve le dernier volet.

Dans les huit jours suivant la date de reclassement ou de licenciement, l’employeur transmet à la CPAM le volet reçu par le salarié.

II – La situation du salarié, un mois après la seconde visite médicale constatant l’inaptitude définitive.

A l’expiration du délai d’un mois imparti à l’employeur pour effectuer une recherche de reclassement, si le salarié n’est ni licencié ni reclassé, l’employeur est dans l’obligation de reprendre le paiement du salaire.

Le paiement de ce salaire doit correspondre « à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. » Articles L 1226-4 et L 1226-11 du Code du travail.

La jurisprudence est formelle, il n’est pas possible de substituer cette reprise de salaire en imposant au salarié la prise de congés payés (Cass.soc. 3 juillet 2013 n°11-23.687).

Cette obligation de reprise de paiement de salaire incombant à l’employeur ne doit pas être assimilée à une sanction pour défaut de reclassement. Contrairement à ce que disent certains commentateurs…

Il convient d’envisager cette exigence comme une obligation de solidarité vis-à-vis du salarié inapte. En effet, n’oublions pas que le salarié accuse une perte de rémunération sur un minimum de quinze jours, période comprise entre les deux visites médicales.

Par ailleurs, une réponse ministérielle récente (QE n°8825, JOANQ 30-10-2012 p.6086, réponse publ. 22-01-2013 p.874, 14ème législature) invite fortement les employeurs à respecter un délai de 2 mois avant d’envisager toute action de reclassement ou de licenciement à l‘égard du salarié inapte.

Depuis le Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l’organisation de la médecine du travail, la contestation de la décision du médecin du travail est limitée à deux mois à compter de l’avis d’inaptitude.

L’annulation de l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail priverait le licenciement prononcé de sa cause réelle et sérieuse.

Il en résulte que par précaution, les entreprises laissent s’écouler un délai de deux mois avant toute décision.

La reprise du paiement du salaire est donc inévitable si l’on tient compte de cette position prudentielle.

III – Situation du salarié après un mois à compter de la deuxième visite médicale constatant l’inaptitude définitive, qui est à nouveau en arrêt maladie

Au moment de la reprise du paiement du salaire, il n’est pas rare que le salarié concerné soit en arrêt maladie et perçoive en conséquence des indemnités journalières de sécurité sociale.

Se pose alors la problématique du cumul de ces indemnités journalières de sécurité sociale avec la reprise du paiement des salaires.

Deux situations sont à envisager :

• Le salarié perçoit directement les indemnités journalières :

Dans ce cas-ci, selon une jurisprudence constante, l’employeur ne peut déduire du montant des salaires versés les prestations de sécurité sociales et de prévoyance perçues par le salarié lorsque celui-ci est aussi en période de maintien de salaire du fait de l’inaptitude. (Cass.soc., 19 mai 1998, n°95- 45.637 ; Cass.soc.,16 février 2005, n°02-43.792 ; Cass.soc.,9 janv.2008, n°06-41174).

La CPAM disposerait d’une action directe vis-à-vis du salarié quand à une demande de remboursement des indemnités journalières, si elle a connaissance que le salarié dispose d’un revenu de remplacement constitué par le maintien intégral de salaire indépendant de toute activité professionnelle.

Il pourrait être judicieux que l’employeur adresse dans ce cas un courrier à la CPAM pour l’informer que le salarié perçoit un revenu de remplacement, indépendant d’une reprise d’activité professionnelle, pour inviter ainsi à la CPAM à se positionner.

A défaut, le salarié aurait clairement un intérêt financier à se voir prolonger un nouvel arrêt maladie, même si l’octroi d’une telle prolongation dépend de l’appréciation du médecin traitant. Un médecin traitant a-t-il nécessité de prescrire un arrêt de travail à un salarié dont le contrat est déjà suspendu et pour lequel le salarié perçoit déjà un revenu de remplacement ?

• l’employeur est subrogé de plein droit à l’assuré dans les droits de celui-ci aux indemnités journalières qui lui sont dues en vertu de l’article R323-11 du Code de la sécurité sociale :

Il faut davantage s’attarder sur ce cas précis.

La Cour d’appel de Douai avait tenté de s’appuyer sur le principe de non cumul des salaires : « S’il est acquis en jurisprudence que l’employeur ne peut déduire le montant des prestations de sécurité sociale et de prévoyance déjà reçues par le salarié, ce dernier ne peut cumuler les indemnités journalières de sécurité sociale, qui sont un revenu de remplacement, avec le maintien de salaire. » Cour d’appel de Douai, 31 janvier 2012 n° de rôle 11/00686.

Néanmoins, la Cour de cassation a censuré cette position lors d’une décision du 18 décembre 2013. « La question de la conservation des avantages reçus au titre des prestations versées par l’organisme de sécurité sociale en raison de l’état de santé du salarié relevant des seuls rapports entre ces derniers ». Cass.soc., 18 décembre 2013 , 12-16460.

Cette décision, se ralliant à la position jurisprudentielle tenue dans le cas où c’est le salarié qui perçoit directement les prestations sociales, doit toutefois être nuancée.

En effet, il est regrettable que la chambre sociale ne se soit pas attardée sur ce point. Aucune référence n’est faite concernant la possibilité de cumuler des indemnités journalières avec un revenu de remplacement. Cette question est simplement renvoyée aux parties concernées à savoir, la caisse primaire d’assurance maladie et l’assuré.

Or, dans le cas de figure où c’est l’employeur qui est subrogé dans les droits du salarié, en cas de répétition de l’indu exercé par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, c’est à l’encontre de l’employeur que l’organisme pourra exercer cette action selon les règles applicables à l’action en répétition de l’indu mais également de la jurisprudence.

« L’action en répétition de l’indu pouvant s’exercer soit contre celui qui a reçu le paiement soit contre celui pour le compte duquel il a été reçu, la caisse devait s’adresser directement à l’employeur et non à la salariée qui n’avait reçu aucun versement direct de la caisse d’assurance maladie » (Cass.soc 19 juillet 2001, n°00-14.390).

Cette possibilité de cumul, ouverte par la jurisprudence, « en l’absence de disposition expresse prévoyant la déductibilité des prestations sociales » (Cass.soc. 22 octobre 1996 n°94-43691), va à l’encontre de la circulaire ministérielle n°93-11 du 17 mars 1993. Cette circulaire rappelle le principe selon lequel le salarié ne peut percevoir une rémunération plus élevée que celle habituellement versée.

Aucune décision de justice n’a été rendue devant les juridictions de sécurité sociale pour savoir si un salarié avait le droit de cumuler des indemnités journalières avec un revenu de remplacement.

C’est sur le plan du droit de la sécurité sociale, qu’il est nécessaire d’obtenir une prise de position.

Le salarié tant qu’il est à nouveau en arrêt maladie pourrait donc bénéficier de ressources nettement supérieures à celles qu’il percevrait s’il travaillait. Cette situation peut perdurer plusieurs mois.

Nécessairement, cela n’incite pas le salarié à reprendre une activité ou encore à se positionner sur un reclassement éventuel.

A cette fin, il est conseillé aux employeurs se trouvant dans cette hypothèse d’informer la caisse primaire d’assurance maladie afin qu’elle se positionne.

Actualité

Par une décision du 3 mars 2015, la Cour de cassation vient circonscrire l’étendue de la réparation du préjudice d’anxiété aux seuls travailleurs de l’amiante ayant appartenu à une entreprise inscrite dans un arrêté ministériel ouvrant droit au dispositif de préretraite amiante.

« Attendu que pour condamner l’employeur à payer au salarié une certaine somme en réparation de son préjudice d’anxiété, l’arrêt retient que peu importe que les deux sociétés en cause ne soient pas mentionnées à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, dès lors que le salarié a été directement exposé à l’amiante du mois de février 1970 au mois d’avril 1979, sans que la preuve ne soit rapportée, par l’employeur, que toutes les mesures nécessaires ont été prises pour protéger de manière collective et individuelle, le personnel exposé aux poussières d’amiante, dans le respect des dispositions de l’article 4 du décret du 17 août 1977 ;
Qu’en statuant ainsi, alors que la réparation du préjudice d’anxiété n’est admise, pour les salariés exposés à l’amiante, qu’au profit de ceux remplissant les conditions prévues par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et l’arrêté ministériel, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; » Cass.soc 3 mars 2015 n°13-26175.

Une telle approche du préjudice d’anxiété est contestable à partir du moment où des salariés peuvent se prévaloir d’une exposition à l’amiante sans moyen de protection adéquat, et reviendrait à créer une inégalité face à l’obligation générale de sécurité.

Pourtant, l’égalité est un des trois principes figurant dans la devise de la République Française. Le principe d’égalité est d’ailleurs constitutionnellement reconnu car présent dans notre bloc de constitutionnalité (Pour exemple : article 1er de la DDHC de 1789, article 6 de la DDHC ou encore article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958).

En effet, le salarié invoquant un préjudice d’anxiété peut très bien prouver l’existence de son préjudice et en demander la réparation sur d’autres fondements tels que l’obligation générale de sécurité incombant à l’employeur (article L 4121- 1 du Code du travail ), textes existants aussi pour les fonctionnaires, et plus généralement dans le cadre de la Directive Européenne 89/391 du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesure visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail).

La notion d’anxiété est susceptible d’exister pour des maladies supposant des périodes d’exposition longues… (selon les tableaux de maladies professionnelles), à la différence d’un préjudice moral simple. Il est à noter à ce titre qu’un jugement du conseil de prud’hommes a accordé la réparation d’un préjudice d’anxiété dans le cadre d’une exposition à des produits nocifs (CPH de Longwy 6/02/15 n° 13/00174).

Il est donc important de rester vigilant à l’évolution de la jurisprudence en la matière.

Jurisprudence

PRÉCISIONS DE L’ÉTENDUE DE L’OBLIGATION DE RECLASSEMENT EN MATIÈRE D’INAPTITUDE

Au cours de l’année 2014, la Cour de cassation a eu plusieurs fois l’occasion d’affiner sa position quant aux obligations de reclassement incombant à l’employeur. Plus  particulièrement concernant les modalités de recherche ainsi que la preuve d’une recherche effective.

Premier apport, la chambre sociale rappelle clairement que le simple fait d’avoir recherché un autre poste disponible n’est pas suffisant. En l’espèce ; l’employeur démontrait bien ne pas avoir de poste disponible en adéquation avec les préconisations du médecin du travail.

Néanmoins, la Cour de cassation note « qu’aucune démarche quant à la recherche de mesures telles que transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail n’avait été faite ». La recherche de reclassement effectuée par l’employeur était donc incomplète tant que la recherche d’aménagement ou de transformation de poste n’avait pas été effectuée. (Cass.soc 19 mars 2014 n°12-29167).

C’est également à l’employeur de justifier du périmètre de reclassement et en conséquence de son impossibilité de reclasser dans le cadre de l’étendue de ce périmètre. C’est la précision de l’arrêt du 28 mai 2014. En l’espèce, l’employeur ne fournissait pas d’éléments attestant de l’étendue du périmètre dans lequel pouvait s’effectuer la recherche de reclassement.

C’est ce que déplore la Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation : « l’employeur ne produisait pas d’organigramme permettant de vérifier la composition exacte du groupe auquel il appartenait, (…) ».

L’importance de la justification de la recherche de reclassement est une nouvelle fois ici soulignée. (Cass.soc 28 mai 2014 n°13-14189).
Bulletin rédigé par Maître LEDERMANN, AFC Ledermann
50 rue de Lalande – 33 000 BORDEAUX

Bulletin JSA – FEVRIER 2015

Bulletin rédigé par Maître LALANNE

SCP D’AVOCATS HAY LALANNE GODARD HERON BOUTARD SIMON
1 rue du 33 ème Mobiles
CS 21508
72015 LE MANS CEDEX 2


 

Actualité

RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : SAVOIR TRANSIGER

La transaction consécutive à une rupture du contrat de travail est un contrat par lequel l’employeur et le salarié préviennent ou mettent fin par des concessions réciproques à toutes contestations résultant de cette rupture.

La transaction n’est pas un mode de rupture amiable du contrat de travail mais un règlement amiable des conséquences d’une rupture déjà intervenue.

Il importe de s’intéresser :
– à sa mise en œuvre
– à ses conséquences

I- MISE EN ŒUVRE DE LA TRANSACTION

La transaction s’analyse comme un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naitre. (Code Civil articles 2044 à 2058)

Il est en effet malheureusement fréquent qu’a l’occasion de la rupture d’un contrat de travail surviennent des difficultés ou des contestations de tous ordres (licenciement, démission, mise à la retraite, harcèlement, heures supplémentaires, rappel de salaire …).

Transiger est un moyen de régler ces difficultés et d’y mettre un terme définitif en évitant l’aléa judiciaire.

Cependant la transaction en elle-même doit être sécurisée pour éviter qu’elle ne soit par la suite dénoncée.

Ainsi la transaction est valable si:
– il existe un litige
– elle est conclue une fois que la rupture du contrat de travail est définitive
– elle comporte des concessions réciproques
– elle traduit l’exact consentement des signataires

1) L’existence d’un litige

En tout état de cause, il faut nécessairement relever l’existence d’un litige pour pouvoir transiger dans la mesure où la transaction constitue précisément un mode de règlement de ce litige. (Cassation Sociale 25.09.2007 N° 05-45.309)

A défaut, la transaction est réputée sans cause.

Ainsi le Juge est tenu de vérifier l’existence d’une contestation ou son éventualité.

2) La transaction est conclue après que la rupture du contrat de travail soit définitive

La transaction ayant pour objet de mettre fin au litige résultant d’un licenciement ne peut être valablement conclue qu’une fois la rupture intervenue et définitive. (Cassation Sociale 13.01.1998 N° 95-41.592P)

A ce titre la transaction ne peut être ni signée ni même négociée avant que la rupture ne soit intervenue (Cassation Sociale 17.10.2007 N°06-41.846).

En effet pour transiger dans la plénitude de ses droits, le salarié ne doit plus être sous la hiérarchie de son employeur et doit connaître avec précisions les motifs à l’origine de la rupture de son contrat de travail pour définir ses prétentions et ainsi pouvoir valablement transiger.

Toute transaction conclue antérieurement à la rupture est frappée de nullité et ne produit aucun effet libératoire.

Ainsi est nulle la transaction :

– conclut en l’absence de notification préalable du licenciement (Cassation Sociale 18.02.2003 N° 00-42.948 P)
– qui porte la même date que la lettre de licenciement (Cassation Sociale 05.05.2010 N° 08-44.643)
– signée le jour de la remise de la lettre de licenciement (Cassation Sociale 25.04.2001 N° 99-41.499)
– signée après l’envoi de la notification du licenciement par lettre recommandée avec avis de réception mais avant que le salarié ne l’ait reçu (Cassation Sociale 01.07.2009 N° 08- 43.179 P)
– discutée avant la notification du licenciement sans être modifiée par la suite même si elle a été signée après licenciement (Cassation Sociale 08.06.2011 N°09-43.221)

Il importe de noter que la nullité de la transaction conclue avant la notification du licenciement est une nullité relative instituée exclusivement dans l’intérêt du salarié sans que celle-ci ne puisse être invoquée par l’employeur.

Il est à ce titre hautement recommandé de respecter un délai de réflexion entre la notification de la rupture et la signature de la transaction.

3) nécessité de concessions réciproques

Cette condition de validité ne résulte pas à proprement parlé de l’article 2044 du Code Civil, mais plutôt d’une construction jurisprudentielle.

La validité de la transaction est subordonnée à l’existence de concessions réciproques.

Par « concession », il faut entendre renonciation à un droit, un avantage ou à une demande, les parties mettant alors en balance les avantages et les inconvénients des propositions.

Il faut en déduire que les parties doivent donc abandonner réciproquement une part de leur prétention pour que l’acte soit qualifié de transaction.

Il appartient au Juge du fond de contrôler l’existence des concessions réciproques ; lequel doit préciser dans sa décision la nature des concessions consenties par l’employeur et le salarié afin que la Cour de Cassation puisse exercer son contrôle sur leur réalité. (Cassation Sociale 16.11.2010 N°09- 68.415).

La Cour de Cassation exige que la concession soit « appréciable ».

Ainsi ne consent pas de concession l’employeur qui :

– verse une indemnité conventionnelle d’un montant dérisoire de 915 € contre l’engagement du salarié de ne pas concurrencer l’entreprise et de ne pas contester la rupture du contrat (Cassation Sociale 18.05.1999 N° 96- 44.628 P)
– verse une indemnité forfaitaire transactionnelle présentant un caractère dérisoire (Cassation Sociale 19.06.2013 N° 12-12.941)
– renonce à un dépôt de plainte et à une indemnisation à charge pour le salarié de ne pas contester son licenciement.

Le juge peut encore considérer, s’agissant d’une lettre de licenciement ne contenant aucun motif, que n’effectue aucune concession l’employeur qui verse une indemnité correspondant à 3 mois de salaire alors qu’en l’absence de motif énoncé dans la lettre de licenciement, le salarié peut prétendre à une indemnisation minimale de 6 mois de salaire (Cassation Sociale 13.10.1999 N°97-42.027 p)

4) consentement des parties

Conformément au droit commun des contrats, la transaction suppose l’existence d’un consentement non vicié (Code Civil article 1108).

Il appartient au salarié d’apporter la preuve qu’un vice a été de nature à affecter son consentement (Cassation Sociale 14.03.2001 N°99-40.925).

Ainsi il a été jugé que ne donne pas librement son consentement le salarié qui ne sachant pas lire le français n’a pas compris la signification et la portée du document signé (Cassation Sociale 14.01.1997 N°95- 40.363).

En revanche, il n’y a ni défaut, ni vice du consentement lorsque la transaction a été signée par un salarié éprouvant des difficultés pour écrire le français et qui a disposé d’un long délai pour prendre conseil avant de signer l’acte (Cassation Sociale 23.11.2011 N°10-11.277).

Bien que non obligatoire dans l’absolu, il est conseillé de consacrer la transaction dans le cadre d’un écrit établi en autant d’originaux que de parties signataires.

Enfin, et s’agissant d’un salarié protégé, la transaction demeure possible sous la double condition de la notification d’un licenciement précédé de l’autorisation administrative.

II- CONSÉQUENCES DE LA TRANSACTION

1) A l’égard des parties

La transaction a, entre les parties, l’autorité de chose jugée en dernier ressort (Code Civil article 2052).

A ce titre, elle a les mêmes effets qu’un jugement devenu irrévocable et constitue une fin de non-recevoir d’une éventuelle action en justice (Cassation Sociale 07.06.1989 N°86- 43.012 P).

En conséquence le Juge ne peut trancher le différend que la transaction a pour objet de clore (Cassation Sociale 21.05.1997 N° 95-45.038 P) mais il peut pour apprécier les concessions réciproques vérifier l’existence du motif de licenciement (Cassation Sociale 23.01.2001 N°98-41.992 P).

Pour autant et par exception au principe ci-dessus rappelé, le salarié peut intenter une action qui n’a pas de lien direct avec la rupture du contrat de travail à l’origine du différend.

En effet les transactions :

-se renferment dans leur objet et leur cause et la renonciation à tous droits ou actions ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu (Code Civil article 2048)
-ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris (Code Civil article 2049)

Il importe de souligner que la transaction ne porte que sur les éléments qui ont fait l’objet d’un différend entre l’employeur et le salarié (Cassation Sociale 05.05.2010 N°08-44.085 P).

La renonciation « à toute action ou réclamation » doit être regardée avec une relative prudence quoiqu’un arrêt récent de la Cour de Cassation du 5 novembre 2014 N° 13-18.984 semble redonner « une certaine couleur » à ce type de formule.

Dans un arrêt du 04 juillet 1997, l’Assemblée Plénière de la Cour de Cassation a donné à cette formule une portée très générale en considérant en l’espèce que la prime d’intéressement était incluse dans la transaction peu important qu’elle ait été conclue à l’occasion d’un litige portant sur le dédit de la clause de non concurrence (Cassation Assemblée Plénière 04.07.1997 N°93-43.375 P).

La conséquence de cet arrêt est que rédigée en termes généraux, la transaction constituerait une fin de non-recevoir pour toute action prud’homale.

Cependant la position de la Chambre Sociale est plus nuancée.

Elle a ainsi jugée que lorsque l’accord intervenu est limité dans son objet il ne peut faire échec à l’examen des autres prétentions du salarié qui lui étaient étrangères (Cassation Sociale 05.02.1992 N°88-44.794 P).

De même une transaction portant exclusivement sur un litige relatif à une clause de non concurrence ne fait pas obstacle à une indemnité de congés payés (Cassation Sociale 20.03.1990 n°86-43.768 P).

Enfin, une transaction portant sur la rupture du contrat de travail, et excluant les créances salariales, permet au salarié de réclamer une créance à ce titre.

De même sauf stipulation contraire, les droits ou obligations destinés à trouver application postérieurement à la rupture du contrat de travail, ne sont par principe pas affectés par la transaction destinée à régler les conséquences d’un licenciement.

Il en va ainsi de :

– la clause de non concurrence (Cassation Sociale 18.01.2012 N°10-14.974)
– la priorité de réembauche qui constitue un droit futur éventuel (Cassation Sociale 28.02.2006 N° 03-47.860)

D’une façon générale la renonciation du salarié ne peut pas être étendue à un droit qui ne pouvait pas être compris dans l’objet de la transaction sauf si celle-ci l’exclut expressément.

2) A l’égard des tiers

« La transaction faite par l’un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut être opposée par eux » (Code Civil article 2051).

Ainsi, lorsqu’un employeur conclut avec un salarié un acte transactionnel et qu’il a le même litige avec plusieurs de ses anciens salariés, ces derniers ne sauraient exiger la conclusion d’une transaction au contenu similaire ni même l’invoquer dans le cadre d’un débat judiciaire. Réciproquement, l’employeur ne saurait exiger de ses salariés la conclusion d’une transaction identique et qui heurterait le principe de l’autonomie de la volonté et ses corollaires.

De même l’employeur ne peut invoquer le contenu de la transaction à l’occasion d’un litige.

L’effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l’autorité d’une transaction à laquelle ils ne sont pas parties, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme la transaction (Cassation Sociale 25.09.2013 N°12-17.863).

En l’espèce les salariés avaient expressément renoncés dans la transaction conclue avec la société cédante, à toutes demandes indemnitaires relatives à leurs licenciements, Ils ont par la suite engagé une action contre le cessionnaire au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’action a été rejetée en présence de la renonciation à leurs droits dont le cessionnaire, quoique non partie à la transaction, était fondé à se prévaloir.

BONNE TRANSACTION

Jurisprudence

APRÈS LES EXPERTS-COMPTABLES (BULLETIN JSA JUIN 2014), LE TOUR DES NOTAIRES

La Cour de Cassation poursuit un contrôle sévère des conventions de forfait en jours sur l’année.

Après avoir annulé par arrêt du 14 mai 2014, N°12-35.033 les dispositions de l’article 8.1.2.5 de la Convention Collective des Cabinets d’Experts- Comptables, elle annule par arrêt du 13.11.2014 N°13-14.206 les dispositions de l’article 8.4.2 de la CCN du Notariat du 08.06.2001 qui selon elle ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail des salariés ayant conclu une convention de forfait en jours restent raisonnables à assurer une bonne répartition, dans le temps, de leur travail et donc la protection de leur sécurité et de leur santé.

La haute juridiction rappelle que toute convention en forfait jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
Bulletin rédigé par Maître LALANNE, SCP D’AVOCATS HAY LALANNE GODARD HERON BOUTARD SIMON
1 rue du 33ème Mobiles – CS 21508 – 72015 LE MANS cedex 2

Bulletin JSA – JANVIER 2015

Bulletin rédigé par Maître COTTEREAU

Cabinet Cottereau Meunier Bardon
19 avenue de Grammont
BP 7-1013
37010 TOURS CEDEX 01


Éditorial

LA JURIDICTION PRUD’HOMALE EN QUESTION : FAUT-IL ALLER VRAIMENT PLUS LOIN ?

Le projet de loi MACRON, à la lumière des rapports Marshall et Lacabarat, projette de réformer la Justice Prud’homale pour la simplifier, l’accélérer et la sécuriser par :

• Une formation initiale et continue obligatoire des conseillers prud’homaux, le renforcement de leurs obligations déontologiques et une procédure disciplinaire,
• Des délais de jugement abrégés avec une procédure accélérée devant une formation de jugement présidée par un Juge professionnel,
• Le regroupement sélectif du contentieux lorsqu’il est de l’intérêt d’une bonne Justice que des litiges pendants devant plusieurs Conseil de Prud’hommes situés dans le ressort d’une même Cour d’appel soient jugés ensemble.

S’il faut à coup sûr saluer le mérite de l’intention dans un domaine où l’inertie est de mise depuis des décennies, à raison de la résistance obstinée des syndicats salariés comme patronaux, encore faut-il s’interroger :

1. Sur le choix de la méthode,
2. Sur l’enjeu de la réforme.

Autrement dit, la réforme relève-t-elle de la compétence du Ministre du budget ? Est-elle suffisamment ambitieuse ?

Le constat

• Le contentieux du travail s’intègre dans un contentieux social éclaté
• La juridiction prud’homale est sur la sellette

– L’éclatement du contentieux social

Le rapport Lacabarats souligne à juste titre (p. 52) l’éclatement du contentieux du droit du travail qui compte rien moins que 7 Juges. Si l’on ajoute à ce légitime constat le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, le contentieux technique (regroupant l’incapacité et la tarification) et l’expertise médicale, on mesure l’ampleur de la réforme en attente qu’aucun Ministre de la Justice n’a jusqu’à présent osé engager.

– La mise sur la sellette de la juridiction prud’homale

Les enjeux sont considérables compte-tenu de la complexité des procédures inhérentes aux compétences concurrentes générant un risque de conflit de juridiction et des délais trop longs.

L’arrêt récent du 23 octobre 2014, qui rappelle que le Conseil de Prud’hommes n’est pas compétent pour faire reconnaître un manquement à l’obligation de sécurité en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle en est l’illustration éclatante (cass. soc. 23 octobre 2014, n° 13-16497).

L’angle de la prise de vue doit donc s’élargir et ne pas rester circonscrit à l’obsolescence indiscutable du Conseil de Prud’hommes à raison de la perte de légitimité des conseillers prud’homaux dont l’élection n’est plus qu’un trompe l’œil avec :
– un taux de participation aux élections dérisoire,
– un taux de conciliation réduit à l’état de peau de chagrin (80% avant la guerre à moins de 10% aujourd’hui),
– un droit du travail trop complexe donnant un taux d’appel de 60% alors qu’il est de 5 à 15% devant les autres juridictions,
– des délais de procédure de première instance et d’appel trop importants : 13 mois en première instance et 25 mois si la procédure fait l’objet d’un départage, 15 mois en appel,
– un taux rédhibitoire de décisions déjà rendues par des magistrats professionnels si l’on additionne le taux d’appel (60%) et le taux national de départage (30%).

Les propositions

Le constat milite en faveur d’une réforme plus globale et plus ambitieuse consistant dans les grandes lignes :

• à unifier le contentieux social avec la création d’un Tribunal Social,
• à créer un échevinage spécialisé avec un Président spécialisé et des assesseurs désignés et non élus, également spécialisés et dument formés,
• à harmoniser la procédure avec :
– un mode de saisine unique,
– une conciliation facultative,
– une véritable mise en état,
– une procédure écrite obligatoire au 1er et 2ème degré,
– la suppression de la règle de l’unicité d’instance compte-tenu de surcroît de la réduction notoire de délais de prescription.

Que 2015 permette de rêver à de vraies et nobles réformes.

Actualité

DU NOUVEAU AVEC LE PASSAGE DU DIF AU CPF

Depuis le 1er janvier 2015, le compte personnel de formation (CPF) a pris le relai du Droit Individuel à la Formation (DIF). L’employeur doit désormais informer avant le 31 janvier 2015 les salariés sur leurs heures de DIF non consommées au 31 décembre 2014.

Depuis le 5 janvier 2015, tout salarié a accès à son CPF sur le site www.moncompteformation.gouv.fr. Il peut y consulter librement le nombre d’heures acquises et les listes des formations éligibles.

Quid des heures de DIF portables au moment de la rupture du contrat de travail non consécutive à une faute lourde ?

Les heures étaient utilisables pendant la durée du chômage ou chez un nouvel employeur pendant deux ans suivant l’embauche. Depuis la disparition du DIF, le sort de ces heures n’est pas prévu.

Autrement dit, le nouvel employeur doit-il inscrire les heures portables sur l’attestation susvisée en même temps que les heures acquises au sein de son entreprise ?

D’aucuns considèrent qu’en l’absence de disposition légale ou règlementaire, il n’est pas de la responsabilité du nouvel employeur de mentionner des heures dont il n’a pas forcément connaissance (Dict. permanent social décembre 2014, p. 2).

Il nous paraît sage de recommander :

1. Au nouvel employeur

a. De faire signer au salarié une déclaration sur l’honneur sur les heures de DIF acquises et d’en exiger la justification
b. De mentionner ensuite les heures déclarées sur l’attestation spécifique

2. A l’ancien employeur qui licencie de rappeler dans la lettre de licenciement le changement de dispositif et le passage du DIF au CPF

3. Autrement dit, aux rédacteurs de lettre de licenciement de revisiter leurs modèles !

EN MATIERE DE STAGE
D N°2014 1420 27 NOVEMBRE 2014 JO 30 NOVEMBRE 2014

Lorsque la durée d’un stage est supérieure à deux mois consécutifs (ou au cours d’une même année scolaire ou universitaire à deux mois consécutifs ou non), le stagiaire perçoit une gratification mensuelle versée par la structure qui l’accueille. Le montant minimal en l’absence de convention de branche ou d’accord professionnel étendu plus favorable passe de 436,05 € à 479,50 € au 1er décembre 2014 pour 151,67 heures.

L’employeur tient compte du temps de présence effectif du stagiaire : toute période au moins égale à 7 heures de présence, consécutive ou non, équivaut à un mois.

La gratification doit être versée en sus des frais engagés par le stagiaire et des avantages offerts pour la restauration, le transport ou l’hébergement. Ne pas oublier de remettre à la fin du stage une attestation mentionnant la durée effective totale du stage, ainsi que le montant total de gratification versée.

Jurisprudence

LA SURVEILLANCE PAR UN SERVICE INTERNE A L’ENTREPRISE EST LICITE

Le recours au service d’un détective privé est un moyen de preuve illicite et rend le licenciement sans cause réelle ni sérieuse lorsque le motif repose exclusivement sur le compte-rendu de filature (cass. soc. 22 mai 1995, n° 93-44078, n° 2322 P+F).

D’où la question de savoir s’il en est de même en présence d’un salarié surveillé par un service interne à l’entreprise, la Cour de cassation répond clairement par la négative :

« Le contrôle de l’activité d’un salarié au temps et au lieu de travail par un service interne à l’entreprise chargé de cette mission ne constitue pas en soi, même en l’absence d’information préalable du salarié, un mode de preuve illicite dès lors que ledit contrôle organisé par l’employeur est confié à des cadres…… était limité au temps de travail et n’avait impliqué aucune atteinte à la vie privée des salariés observés » (cass. soc. 5 novembre 2014, n° 13-18427).

CONTRÔLE URSSAF : TOUS LES INSPECTEURS PROCÉDANT AUX CONTRÔLES DOIVENT SIGNER LA LETTRE D’OBSERVATIONS

L’article R 243-59 du Code de la sécurité sociale impose à l’inspecteur du recouvrement à l’issue du contrôle de communiquer à l’employeur une lettre d’observations. Ce document mentionne l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle, et s’il y a lieu, les observations faites à l’employeur au cours du contrôle.

La Cour de cassation qualifie d’irrégulière une lettre d’observations signée d’un seul inspecteur lorsque plusieurs inspecteurs participent au contrôle.

S’agit-il d’une formalité substantielle ou non ? La Cour de cassation ne le précise pas.

Il est de l’intérêt de l’entreprise redressée de le soutenir pour soulever la nullité du contrôle.

L’argumentation est d’autant plus crédible et opportune que par analogie, la Cour de cassation a considéré que l’absence de mention sur l’avis préalable du contrôle ou la lettre d’observations de la possibilité de se faire assister d’un Conseil suffisait à entraîner la nullité du contrôle et des redressements subséquents (cass. 2ème civ. 3 avril 2014, n° 13-11516 ; cass. 2ème civ 18 septembre 2014, n° 13-17084 ; cass. 2ème civ. 6 novembre 2014, n° 13-23990).
Bulletin rédigé par Maître Cottereau
Cabinet Cottereau Meunier Bardon – 19 avenue de Grammont – BP 7-1013 – 37010 TOURS Cedex 01