Bulletin JSA – JUILLET AOUT 2019
Bulletin rédigé par Maître Annette PAUL
Cabinet BASTILLE AVOCAT
10 Avenue Alsace Lorraine
38000 GRENOBLE
Editorial
LA LOI PACTE LOI N° 2019-486 DU 22 MAI 2019 RELATIVE À LA CROISSANCE ET LA TRANSFORMATION DES ENTREPRISES
VIENT MODIFIER/ASSOUPLIR CERTAINES RÈGLES EN MATIÈRE D’ÉPARGNE SALARIALE.
La loi PACTE LOI n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises vient modifier/ assouplir certaines règles en matière d’épargne salariale.
Compte tenu du faible taux de mise en place des dispositifs d’épargne salariale, notamment dans les PME, de nouvelles mesures ont été prises pour assouplir les règles en vigueur.
Il a déjà été évoqué dans le Bulletin JSA de mai/juin l’impact de la loi PACTE sur le régime de la participation. Des modifications sont également intervenues dans le régime de l’intéressement et de l’épargne salariale.
La mise en place d’un accord d’intéressement, qui rappelons- le permet de verser un « supplément de rémunération » non soumis aux charges sociales, lorsqu’un certain nombre de critères aléatoires propres à l’entreprise sont remplis, connait donc quelques
aménagements, visant à simplifier et favoriser la mise en place de ce dispositif dans les PME.
ASPECTS FINANCIERS
Déjà depuis le 1er janvier 2019, le forfait social est supprimé sur les sommes versées au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, ainsi que sur l’ensemble des versements d’épargne salariale.
Le plafond qui peut être distribué à chaque salarié vient d’être relevé à ¾ du PASS, soit la somme de 30 393 euros par bénéficiaire (y compris le chef d’entreprise et son conjoint collaborateur dans les entreprises de moins de 250 salariés) et toute somme au- delà peut être immédiatement répartie sur les autres bénéficiaires si l’accord le permet.
ÉLARGISSEMENT DES CRITÈRES
Par ailleurs la formule permettant de quantifier la somme à verser fait l’objet d’un élargissement à des objectifs pluri annuels liés aux résultats ou aux performances de l’entreprise.
L’accord peut comporter un intéressement de projet définissant un objectif commun à tout ou partie des salariés de l’entreprise, c’est
à dire viser la bonne fin d’un projet dans un délai donné pour inciter tous les intervenants à respecter « le cahier des charges » de ce projet.
SÉCURISATION
En l’absence de sollicitation de la DIRECCTE dans les 4 mois du dépôt de l’accord, celui-ci se trouve dorénavant sécurisé pour toute la durée de son application (soit 3 ans) vis-à- vis de l’URSSAF et du fisc.
Cependant, l’administration reste autorisée à solliciter des modifications dans les 6 mois du dépôt dès lors que des dispositions de l’accord sont contraires à la loi ; mais cette mise en conformité ne vaut que pour les exercices suivants.
Enfin, la loi prévoit l’engagement de négociations au niveau de chaque branche en vue de la mise en place d’un régime d’intéressement, de participation ou d’épargne salariale (PEI, PERCO) au plus tard le 31 décembre 2020.
PLAN EPARGNE ENTREPRISE
Le PEE a lui aussi fait l’objet d’aménagements visant notamment à permettre une possibilité de versement de l’employeur sans
contrepartie du salarié.
Le plafond d’exonération d’impôt des versements est porté par année à 3/4 du PASS.
Toutes ces mesures, qui visent à inciter les employeurs à s’approprier les différents outils collectifs, nécessitent cependant pour le chef d’entreprise de définir les objectifs à atteindre et à communiquer auprès du personnel pour que chaque acteur se sente concerné par cette récompense collective.
Actualité
RUPTURE CONVENTIONNELLE, ENCORE DES PRECISIONS !
Alors que le dispositif de la Rupture Conventionnelle est en vigueur depuis 2008, la Haute Juridiction est encore amenée à fournir certaines clés d’utilisation
RÉTRACTATION : POUR LE DELAI DE RÉTRACTATION DE 15 JOURS C’EST LA DATE D’ENVOI QUI COMPTE
Selon l’article L 1237-13 du Code du travail, à compter de la date de signature d’une rupture conventionnelle, chacune des parties
dispose d’un délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit à rétractation, sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie.
La Cour de cassation a récemment jugé qu’une rupture conventionnelle non datée est nulle, en ce qu’elle ne permet pas de déterminer le point de départ du délai de rétractation qui est une garantie fondamentale dont le non-respect est de nature à compromettre l’intégrité du consentement des parties Cass. soc. 27-3-2019 no 17-23.586 FS-D Mme D/ Laboratoire des Carmes.
Une telle rupture nulle produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation a déjà jugé que la fin de ce délai s’apprécie à la date d’envoi du courrier par le salarié et non à sa date de réception par l’employeur (Cass. soc. 14-2-2018 no 17-10.035 FS-PB Mr X / Sponsor Graphic).
Elle vient de confirmer que cette règle de décompte s’applique aussi dans le cas où c’est l’employeur qui exerce son droit à rétractation. Cass. soc. 19-6-2019 n° 18-22.897 F-D MrJ/ Société tous services Rappel : Le délai de rétractation démarre au lendemain de la date de signature de la convention de rupture et se termine au quinzième jour à 24 heures (Circ. DGT 2008-11 du 22-7-2008).
Conformément à l’article R 1231-1 du Code du travail, lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Si la demande d’homologation à la DIRECCTE est expédiée avant réception de la rétractation adressée dans le délai de 15 jours, cet envoi rend inopérant l’homologation qui sera accordée par l’Administration.
RUPTURE CONVENTIONNELLE ET ACCIDENT DU TRAVAIL
Cass. soc. 9-5-2019 n° 17-28.767 FS-PB, T. c/ Sté AFR France
La Cour de cassation reconnait la validité d’une rupture conventionnelle homologuée conclue avec un salarié qui bénéficie d’un avis d’inaptitude physique d’origine professionnelle, SAUF preuve d’une fraude ou d’un vice du consentement.
La Cour a déjà validé cette possibilité pour une rupture conventionnelle conclue pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à l’accident (Cass. soc. 30-9-2014 n° 13-16.297 FS-PBR Mme X /société Strand Cosmetics Europe)
Elle permet aussi de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié déclaré apte avec réserves à la reprise du travail, SAUF si ce dernier prouve que l’employeur avait en réalité voulu éluder les dispositions du Code du travail relatives à la réintégration du salarié apte (Cass. soc. 28-5-2014 n° 12-28.082 FS-PB Mme X /société Biscuiterie Les Deux Soleils).
L’employeur doit s’assurer de pouvoir démontrer que l’ensemble du processus a été scrupuleusement respecté, et que le salarié a ainsi pu s’engager en toute connaissance de cause.
CANICULE ET CONDITIONS DE TRAVAIL
Avec les périodes de forte chaleur revient le leitmotiv des « congés canicules ». Nous revenons sur les obligations en vigueur.
Selon l’INRS, au-delà de 30 °C pour une activité sédentaire, et de 28 °C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés.
En période de canicule, période de vigilance orange telle que nous venons de traverser, il y a donc un risque accru d’accidents, qui impose que chacun agisse pour préserver la santé des salariés.
Il sera rappelé que l’employeur est tenu à une obligation de moyens renforcés en matière de santé au travail.
Le document unique d’évaluation des risques professionnels, obligatoire pour toute entreprise se doit d’évaluer les risques liés aux ambiances thermiques, de vérifier que la ventilation des locaux de travail est correcte et conforme à la réglementation et d’aménager les postes extérieurs. L’employeur doit mettre à la disposition des salariés de l’eau fraîche et potable, à proximité des postes de travail.
Par ailleurs il est vivement conseillé aux employeurs de prendre, durant les vagues de chaleur, des dispositions en termes d’organisation et de fonctionnement de l’entreprise telles que :
- informer les salariés des risques, des moyens de prévention, mettre en place les adaptations techniques pour limiter les effets de la chaleur (stores, volets, etc.);
- prévoir des moyens utiles de protection (ventilateurs, brumisateurs d’eau, etc.) ;
- adapter l’organisation du travail, ajuster les horaires de travail, par exemple, en organisant un début d’activité plus matinal et en décalant le travail des heures les plus chaudes; organiser des pauses supplémentaires ou plus longues ; pour rappel il n’y a pas de prise en charge de la chaleur au titre du chômage intempérie dans le BTP.
- s’assurer que le port des protections individuelles est compatible avec les fortes chaleurs et à défaut adapter le travail.
Enfin, si la température intérieure des locaux atteint ou dépasse 34 °C, en cas de défaut prolongé du renouvellement
de l’air, la Cnam recommande d’organiser l’évacuation des locaux.
Les salariés doivent également être acteurs de leur protection.
Il leur est ainsi prôné de respecter les consignes générales telles que boire suffisamment et en quantité, porter des vêtements
adaptés, ce que l’employeur n’aura pas manqué de leur rappeler.
En dernier ressort, si la chaleur est trop prégnante compte tenu des tâches à réaliser, le salarié s’estimant en danger pourra faire valoir son droit de retrait.
Une concertation devient donc nécessaire pour permettre à chacun de passer ce cap des fortes chaleurs.
Jurisprudence
L’absence de l’employeur sur le lieu de travail lors du décès d’un salarié à la suite d’un accident intervenu à l’occasion de l’exercice de sa mission est un élément indifférent à la constitution du délit d’homicide involontaire et à la mise en œuvre de la responsabilité pénale dudit employeur
Cass. crim., 7 mai 2019, pourvoi no 18-80.418, arrêt no 624 FS-P+B+I.
Il en va ainsi d’un salarié décédé alors qu’il était revenu travailler sur un chantier dont l’architecte lui avait demandé de quitter les lieux pour raison de sécurité, sans utilisation des équipements de sécurité à sa disposition, l’absence de l’employeur étant jugée inopérante, les manquements constatés dans l’organisation de la sécurité du chantier étant par ailleurs soulignés par la juridiction.
Bulletin rédigé par Maître Annette PAUL
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